L'Union européenne liera son aide aux progrès démocratiques dans les pays tiers-méditerranéens. La sixième conférence euro-méditerranéenne rassemblant les ministres des Affaires étrangères, qui doit durer deux jours, s'est ouverte, hier, à Naples. Il s'agira de la dernière réunion ministérielle avant l'élargissement de l'UE, le mois de mai prochain. Les ministres devraient apporter, à cette occasion, leur soutien à la proposition de la Commission visant à créer une Fondation euro-méditerranéenne pour le dialogue interculturel, une Assemblée parlementaire euro-méditerranéenne et un mécanisme renforcé de prêt de la Banque européenne d'investissement (BEI) destiné à encourager les investissements du secteur privé dans cette région. Notons que la conférence de Naples intervient dans une conjoncture difficile, marquée, d'un côté, par l'enlisement du processus de paix au Proche-Orient et la persistance du conflit en Iraq, et, de l'autre, par les attentats sanglants commis à Istanbul, en Arabie Saoudite et au Maroc. “Le partenariat euro-méditerranéen (processus de Barcelone) a connu des avancées sensibles depuis 1995”, reconnaît-on. La déclaration de Barcelone fait de 2010 l'échéance fixée pour la création de la zone de libre-échange euro-méditerranéenne. “Celle-ci est en train de naître dans la foulée du démantèlement des droits de douane effectué dans le cadre des accords d'association euro-méditerranéens et d'accords conclus entre les partenaires méditerranéens eux-mêmes”, souligne-t-on. Des accords ont été signés entre l'UE et tous les partenaires, à l'exception de la Syrie. D'autres sont entrés en vigueur avec la Tunisie, Israël, le Maroc, la Jordanie et l'Autorité palestinienne. Le Liban a signé un accord intérimaire et l'Egypte pourrait faire de même prochainement, en attendant la ratification et l'entrée en vigueur des accords proprement dits. L'Algérie refuse pour le moment de signer un accord intérimaire. La date d'expiration des périodes de transition fixées pour le démantèlement des droits de douane s'étend de 2008 (pour la Tunisie) à 2014 (pour le Liban). Pour l'Algérie et l'Egypte, la période de transition ira au-delà de 2014. Une démarche à suivre pour achever la zone de libre-échange est proposée. Au plus tard le 1er mai 2004, date à laquelle les dix nouveaux Etats membres adhéreront à l'UE, tous les accords d'association euro-méditerranéens déjà signés devraient être ratifiés. “Tout le monde s'accorde sur le fait que l'insuffisance de l'investissement et du développement du secteur privé dans les pays partenaires méditerranéens constitue un obstacle majeur à l'accélération de la croissance et à la création d'emplois”, affirme la Commission européenne. Du coup, l'Union européenne considère que l'aide à l'investissement de l'UE dans cette région devrait aller en priorité aux projets concernant le secteur privé. Le Conseil des ministres de l'UE a décidé le 25 novembre de faire évoluer la Facilité euro-méditerranéenne d'investissement et de partenariat (Femip) et de la renforcer au sein de la Banque européenne d'investissement (BEI). Dans le cadre de la Femip “renforcée”, des réserves de la BEI allant jusqu'à 200 millions d'euros seraient utilisées pour permettre une extension des opérations de partage de risques pouvant aller jusqu'à 1 milliard d'euros. Un fonds fiduciaire d'un montant initial de 20 à 40 millions d'euros serait créé pour diriger de l'argent vers des projets portant sur certains domaines prioritaires : eau, transport, électricité, capital humain. En outre, le Comité de dialogue politique et de coordination serait transformé en un Comité ministériel des ministres des Finances. Le Conseil a également décidé de transférer vers les Partenaires méditerranéens la “marge de supplément” restant dans le mandat de prêt de la BEI, qui s'élève à 2,18 milliards d'euros. La conclusion de la Commission européenne est que les partenaires méditerranéens ne pourront retirer tout le bénéfice du libre-échange que si celui-ci s'accompagne d'une accélération du développement du secteur privé, qui dépend elle-même d'une accélération du rythme des réformes économiques. Reprenant un récent rapport sur le développement humain dans le monde arabe du PNUD, qui insistait sur le fait que le renforcement de la démocratie, le respect des droits de l'Homme et la bonne gestion des affaires publiques étaient essentiels pour le développement politique et économique, la Commission européenne est convaincue de l'existence d'une corrélation entre mauvaise gestion des affaires publiques et faible croissance. “La croissance insuffisante enregistrée par les pays arabes au cours de la décennie écoulée était accompagnée, dans la plupart des cas, de progrès limités sur le plan des réformes politiques”, souligne-t-on. C'est pour cela que la Commission, dans sa communication de mars dernier relative aux orientations dans le domaine des droits de l'Homme et de la démocratisation dans les pays méditerranéens, a proposé d'affecter certaines ressources du programme MEDA en faveur des pays méditerranéens qui progressent le plus rapidement dans ces domaines. M. R.