Très souvent, des femmes victimes de violences ne bénéficient pas de la prise en charge indispensable dans ces cas-là, incluant notamment le suivi psychologique, ni de la protection de leur intégrité physique et morale. Ce constat a fait l'unanimité, hier, chez les intervenants (médecins légistes, épidémiologistes, militantes associatives, hommes de religion…) et les participants au séminaire international sur “les pratiques en matière de violences faites aux femmes”, qui s'est tenu à l'hôtel d'El-Biar, à Alger. Organisée par le Centre d'information et de documentation sur les droits de l'enfant et de la femme (Ciddef), en collaboration avec l'Agence espagnole de coopération internationale par le développement (Eacid), la rencontre de deux jours a donné lieu à “un regard croisé” entre le mouvement associatif et les institutions nationales. Chiffres à l'appui, des médecins légistes des CHU d'Alger, de Tizi Ouzou et d'Annaba, ainsi qu'une épidémiologiste de l'Institut national de santé publique (INSP) et une représentante du ministère de la Solidarité nationale et de la Famille, se sont succédé à la tribune pour alerter sur “la gravité” du phénomène de la violence envers les femmes qui demeure “toujours d'actualité”, et ce, en dépit de la multiplicité des campagnes de sensibilisation et d'information. Différents types de violence ont été mis en évidence, touchant des femmes appartenant le plus à la tranche d'âge 20-40 ans et pour la plupart mariées (ou célibataires à un moindre degré), à savoir, les “violences familiales” où les brutalités conjugales prédominent, les “violences communautaires” et les “violences collectives” commises dans les espaces publics et sur les lieux de travail, infligeant ainsi aux victimes “des coups et blessures, des violences sexuelles, des fractures, des brûlures thermiques et autres plaies profondes, ainsi que des souffrances psychologiques”. “Cela va des simples ecchymoses à la mort en passant par une invalidité permanente”, a révélé le Dr Youcef Mellouk, médecin légiste au CHU d'Annaba, avant d'ajouter : “Peu de traitements ont été prescrits pour les victimes de violences dans la wilaya (Annaba)”. De son côté, le Dr Radia Djekoun, médecin épidémiologiste à l'INSP, a carrément qualifié les violences envers les femmes de “phénomène morbide”. Selon elle, “nombreuses sont les femmes qui ne demandent pas d'aide lorsqu'elles sont victimes de violences, et souffrent en silence”. Le Dr Djekoun a, par ailleurs, montré que ce fléau sociétal est “coûteux” à la fois pour la victime (incapacité au travail, perte de salaire, etc.) et les établissements de santé. Non sans insister sur “l'impact” de ce phénomène sur les nourrissons et les enfants (maladies, diarrhée et malnutrition). “Peu de victimes ont bénéficié de prise en charge psychologique”, a encore soutenu l'épidémiologiste, en référence à une étude menée dans les structures de santé d'Oran de 2009 à 2011. Quant au Dr Madjid Bessaha, président de la Société algérienne de médecine légale à Alger, il s'est notamment demandé “quel est le département ministériel qui s'occupe des questions de violence ?” puis de constater que “c'est tout le monde et personne”. Notons que la journée d'hier a enregistré également l'intervention de M. Chekat, membre de l'association des ulémas d'Algérie et bien connu des auditeurs de la radio Chaîne III. Ce dernier a clairement déclaré que “battre sa femme est une chose qui n'est pas tolérée, voire qui est interdite par l'islam”, dénonçant “certains qui ont pris pour alibi le verset sourate el-Nissa”. “Cette religion, il faut la connaître pour faire face à ce qui nous arrive (en termes d'interprétation des versets coraniques, ndlr) des pays du Golfe”, a-t-il lancé à l'adresse de l'assistance. H A