Les membres du comité central du FLN ont fini par se réunir dans la cour de la kasma d'El-Madania, en raison du refus catégorique de Belkhadem d'ouvrir les portes du siège central. Un vieux militant, qui se tenait à peine debout, lance cette réflexion : “si le pouvoir appuyait notre démarche, on se serait réuni à l'hôtel El-Aurassi ou au Club-des-Pins.” Le sénateur Abderrezak Bouhara était hier la vedette de cette rencontre, lui qui avait tenté avec trois autres “sages” du parti de convaincre Belkhadem d'autoriser la tenue de la réunion au sein du siège central. Mais Bouhara reste optimiste : “C'est normal dans la vie d'un parti. On se rencontre et on débat de nos problèmes. La direction doit écouter ce que nous avons à dire. Je suis un partisan du dialogue, un légaliste”, nous confie-t-il, avant de prononcer un long discours où il accusera Belkhadem d'être contre le dialogue. “celui qui refuse le dialogue a des choses à se reprocher”, dira-t-il. Pour Bouhara, le principal reproche fait à Belkhadem est celui d'avoir dénaturé l'identité du FLN. Le sénateur reproche au secrétaire général du parti de faire de la ligne politique une “géométrie variable”, et d'appeler les membres du CC à rester constants dans leurs positions “car seule la constance fera pression et celle-ci finira par donner des résultats”. Pour revenir à l'objet de la rencontre, les avis des participants divergent sur son ordre du jour et la méthode à suivre. Dès les premières heures de la journée, la couleur est annoncée par les principaux animateurs du mouvement de contestation : “il y a une session ordinaire prévue à la mi-juin, ce sera une occasion pour démettre le secrétaire général. Il nous suffira de 50% plus une voix pour le faire.” Or, le problème des contestataires a été, jusque-là, d'assurer la présence, et surtout la signature, des deux tiers des membres du comité central. Hier, ils étaient 175 présents, alors que 22 autres ont envoyé des procurations et 11 autres ont une absence justifiée, ce qui fait un total de 208 membres. Il manque encore 26 membres pour constituer les deux tiers. Hier, les redresseurs, emmenés par Abdelkrim Abada, étaient présents en force. Même le ministre El-Hadi Khaldi y a pris part. Cependant, les divergences entre redresseurs et frondeurs persistent sur la méthode. Question de leadership ? Peut-être. Toujours est-il que lorsque Boudjemâa Haïchour, le frondeur en chef, s'est levé pour exiger “le constat de vacance du poste de secrétaire général”, Abdelkrim Abada, le chef de file des redresseurs, a refusé qu'on rende publique la motion préparée par les membres du CC, concernant les griefs retenus contre Belkhadem et a estimé que le constat de vacance, tout comme la destitution du SG, se feront lors d'une session ordinaire du parti. La motion a fini par être lue. On y retrouve les principaux reproches faits au secrétaire général quant à sa gestion administrative et politique, mais aussi sa façon de confectionner les listes de candidatures du parti aux législatives. Il y est reproché, notamment à Belkhadem, le non-respect des résolutions du parti et de ses statuts, sa déviation de la ligne politique du parti et la dualité de son discours. Il lui est également reproché sa gestion individualiste du parti et ses décisions arbitraires. Belkhadem est accusé d'avoir violé les statuts du parti en ce qui concerne la confection des listes de candidatures, notamment en ignorant la condition d'ancienneté. Il est accusé d'avoir trahi la promesse faite au comité central de constituer une commission chargée de la confection de ces listes. Il est surtout accusé d'avoir exclu la famille révolutionnaire des listes, alors que sur certaines listes, des personnes au passé douteux ont été imposées. Pire que cela, un membre du comité central accuse le patron du FLN d'avoir exclu les militantes du parti et d'avoir mis à leur place des femmes de ménage. La motion note, enfin, que “la victoire du FLN aux législatives n'est pas le fait de Belkhadem, mais son mérite revient au peuple et aux orientations du président de la république”. La motion annonce le constat de vacance du poste de secrétaire général et appelle à l'installation d'une commission pour le recueil des candidatures au poste de secrétaire général. Mais, parmi les présents, certains pensent que la responsabilité devrait être partagée entre le SG et son bureau politique et que ce dernier doit être, lui aussi, destitué. Les contestataires ont fini par faire adopter leur communiqué final qui reprend leurs positions de principe. Il reste à savoir la suite à donner à leur action. Abderrezak Bouhara, ayant tenté une médiation avec Abdelaziz Belkhadem, a fini par arracher à ce dernier un principe : aux membres du comité central de choisir la date qui leur convient pour la tenue de la session ordinaire du comité central. Pour rappel, le bureau politique, réuni par Belkhadem la semaine dernière, avait proposé la tenue de cette session à la mi-juin. Mais rien n'indique que Belkhadem accepterait la date qui lui serait proposée, surtout s'il est persuadé qu'il ne pourra pas sauver sa tête. Il devrait, donc, tenter de jouer la montre, dans l'espoir de retourner le maximum de membres du comité central, avant la tenue de ladite session. En attendant, le feu couve toujours dans la maison FLN. A B