Les présidents du Conseil européen et de la Commission, Herman Von Rompuy et Jose Emmanuel Barroso, accompagnés de la chef de la diplomatie de l'Union, Catherine Ashton, sont depuis dimanche à Saint-Pétersbourg en Russie, dans le cadre du traditionnel sommet UE-Russie, qui se tient tous les six mois. Après un dîner informel dimanche soir avec le président russe Vladimir Poutine, le sommet s'est ouvert officiellement hier matin. À l'ordre du jour des discussions le commerce, la coopération énergétique et les visas, mais aussi le nucléaire iranien et surtout la crise syrienne. À l'instar du président français François Hollande vendredi soir à Paris, les dirigeants européens devaient tenter, à leur tour, d'infléchir le soutien du maître du Kremlin à Bachar Al-Assad. Avant même l'ouverture du sommet, de violents combats ont éclaté entre l'armée régulière syrienne et les insurgés, lundi à l'aube dans la province d'Idleb. La veille, dimanche, au moment même où le président Bachar Al-Assad s'adressait aux parlementaires nouvellement élus, des combats avaient fait 46 victimes dont des civils, des soldats et des insurgés. L'offensive de l'armée régulière, appelée sans doute à s'intensifier pour tenter de mater la rébellion, s'inscrit en droite ligne du discours prononcé dimanche par Bachar Al-Assad, dans lequel il a prévenu qu'“il n'y aura pas de compromis dans la lutte contre le terrorisme”, que la sécurité du pays était “une ligne rouge” et qu'il défendrait le pays “à n'importe quel prix”. Le sommet intervient alors que la situation en Syrie va droit dans l'impasse. Ni les efforts de François Hollande vendredi dernier ni les appels de Washington et ses pressions ne semblent pouvoir avoir raison de la détermination russe à ne pas lâcher le président syrien et l'entêtement de ce dernier à vouloir résoudre la crise par la force. Dès lors, la démarche des dirigeants européens, contre lesquels Vladimir Poutine est passablement remonté pour des considérations bilatérales de circulation des personnes, n'ont aucune chance de faire bouger les lignes. C'est d'autant plus vrai qu'il n'y a pas de position unifiée de l'Europe et qu'en matière de politique étrangère, les instances européennes ne possèdent que des prérogatives très limitées. Elément aggravant, l'ancien secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, commence à reconnaître l'échec de son plan et à interpellé la communauté internationale pour le faire appliquer ou pour qu'elle trouve un plan de rechange. Dès samedi, lors d'une réunion ministérielle à Doha, il avait déjà suggéré que sa médiation avait atteint ses limites et qu'il fallait “un réexamen en profondeur” de la stratégie de sortie de crise en Syrie. Il s'adressera jeudi à New York au Conseil de sécurité, sans doute pour y faire un constat d'échec de sa mission. Quoi qu'on puisse dire de la position russe face au conflit syrien, quand bien même les intérêts économiques et géostratégiques du Kremlin constituent un facteur majeur à la base de son attitude, le comportement des pays occidentaux et de leur force de frappe militaire, l'Otan en Libye n'en est pas moins décisif. Ayant outrepassé le mandat du Conseil de sécurité, ils ne se sont pas limités à transformer le pays en champ de ruines et à faire assassiner le dictateur libyen dans des conditions abominables, mais ils ont aussi déserté la partie en livrant la Libye à elle-même et en laissant derrière eux un arsenal d'armement lourd à ciel ouvert. C'est à eux qu'on doit le regain d'insécurité dans la zone du Sahel, le retour en première ligne d'Aqmi et le démembrement sanglant du Mali, en attendant, peut-être, d'autres malheurs… M.A. B