Résumé : Kamel s'emporte et met sa femme au pied du mur. Désormais, elle n'aura plus le droit de sortir ou de recevoir qui que ce soit. Il saura la redresser une fois pour toute, car jusqu'à ce jour, elle avait joui d'une grande liberté. Il sortit pour ne revenir que tard dans la nuit, ivre mort. Louisa prend peur. Mme Olivier vint lui parler et tente d'arranger les choses. J'avais préparé le dîner mais je ne pouvais le servir tant qu'il n'était pas là. Mon mari revint une heure plus tard accompagné de notre logeuse. Il paraissait plus détendu et souriait en me demandant : - Louisa, j'ai invité Mme Olivier à dîner, ai-je bien fait ? - Tu as très bien fait... Je vais dresser la table... Je me mets fébrilement à servir le dîner, et Mme Olivier, remarquant mon malaise, me prend la louche des mains et me fait asseoir : - Là... laisse-moi donc m'occuper du service. Cela fait longtemps que je ne me suis pas sentie en famille. Nous dînons en silence. Et pour meubler le manque de conversation, Mme Olivier se met à taquiner Kamel sur son comportement envers moi. Il se met à rire et rétorque que j'étais la seule à blâmer. Blessée dans mon amour propre je lance : - Tu es aussi à blâmer... Je ne t'ai jamais vu dans un tel état... J'ai eu très peur... - Cela t'apprendra à me provoquer. Après le diner, nous prenons un thé, et notre amie se retira. Je me retrouve seule face à la sentence de mon mari. Kamel me regarde puis se met à rire : - Ah ! Louisa... nous nous sommes comportés tous les deux comme des enfants capricieux... Toi tu voulais me marier, et moi je voulais t'enfermer. Je donne libre court à mes larmes qui menaçaient de couler à tout bout de champ, et mon mari vint me prendre dans ses bras : - Louisa... ma petite femme... tu m'as blessé... Tu as ruiné mes sentiments envers toi, et tu voulais que j'accepte tes folles propositions. Jamais je ne consentirais à te quitter, encore moins à divorcer pour prendre une autre femme. Tant que je serais de ce monde, tu resteras à mes côtés... Mes sanglots m'empêchèrent de répondre, mais Kamel lisait en moi. Il resserra son étreinte et essuya ses yeux : - Petite folle... - Et toi donc... ? Il se met à rire : - Nous sommes fous tous les deux... N'est ce pas ? Mais cette folie me plaît. Elle nous permet de nous retrouver et de mieux apprécier nos sentiments réciproques. L'incident était clos. Dès le lendemain, je reprends ma vie quotidienne. Aïssa vint me rendre visite, et j'évite de le mettre au courant de ma querelle avec mon mari. Lui, par contre, me parla de Tassadite qui, selon son raisonnement à lui, avait fait exprès de tomber rapidement enceinte afin de l'enchaîner définitivement à elle. Je réitère à mon frère que le mariage était une chose sacrée et qu'il devrait respecter la volonté de Dieu de faire de lui rapidement un père... Je lui parle de mon cas... Il en fut ému, mais pas convaincu. Alors, j'ose lui poser la question quant à son ménage avec Monique. Il baisse la tête, et reconnaît qu'il était toujours avec elle. Je le sermonne... Tassadite aurait pu l'accompagner... Il n'avait pas le droit de la tromper avec une femme qui faisait deux fois son âge. Qu'en sera-t-il si on apprenait tout ça au village ? Il hausse les épaules et rétorque que l'exil nous poussait à faire des choses insensées. Tassadite, il l'aimait bien... mais il y avait aussi Monique. Des jours durant, je tentais de faire entendre raison à mon frère qu'il devait se résigner à quitter Monique. Au fur et à mesure que les mois passaient, je ressentais davantage son désarroi. Tassadite n'allait pas tarder à mettre son enfant au monde, là-bas, au bled, et Aïssa devrait partir, quelles qu'en soient les circonstances. Mon frère allait devenir père, et nous allons bientôt avoir notre premier héritier. Il vint me proposer de l'accompagner, mais cette fois-ci je ne pouvais le faire. Je venais à peine de retrouver un semblant de sérénité dans mon couple. Les remontrances de Kamel n'étaient rien à côté de mes souffrances silencieuses. Je m'en voulais, et j'en voulais au monde entier. Je ne pouvais avoir un enfant, alors que Aïssa refusait le sien ! Je ne pouvais rester insensible devant la joie de la naissance... À chaque fois, je ressentais une profonde amertume, et cette fois-ci l'évènement allait avoir lieu dans ma famille, et j'allais devenir tante pour la première fois. Kamel aurait voulu qu'on accompagne Aïssa mais il ne put obtenir un congé. Il n'était pas question pour moi de partir cette fois-ci au bled sans mon mari. Mon frère ne se décide à partir qu'après de longues hésitations. Nous l'avons, en fait, poussé à quitter Paris et à rester au bled jusqu'à l'accouchement de sa femme. Au début, il s'était tout de suite opposé à notre proposition. Il avait argumenté son refus par mille et une raisons, infondées bien sûr. Il ne voulait tout simplement pas quitter Monique. (À suivre) Y. H.