Dans cet entretien, Mustapha Merzouk évoque le passage de l'entreprise du secteur privé au secteur public et dresse également un tableau des objectifs à atteindre. Vous avez été désigné à la tête de Tonic Industrie dans une étape cruciale de la vie de l'entreprise, après sa reprise par l'état suite à la faillite de Tonic Emballage. Comment s'est fait le passage du privé au public, et qu'en est-il de la situation de l'entreprise ? Tonic Industrie est une entreprise publique économique (EPE) relevant de la Société de gestion des participations chimie-pharmacie SGP Gephac et créée en avril 2011, après la faillite de Tonic Emballage. Elle emploie 2 500 travailleurs. Doté au début d'un capital social d'un million de dinars, il a été porté par la suite, à l'issue d'une assemblée générale extraordinaire, à 30 milliards DA. Lors du passage du secteur privé au secteur public, la situation de l'entreprise s'est caractérisée par une insuffisance d'organisation et une absence d'un dispositif réglementaire de gestion, avec des problèmes terribles en matière de ressources humaines qui se sont traduits par l'inexistence d'une grille de salaires et de classification proprement dite. Ceci a généré une injustice dans le système de rémunération de l'entreprise privée. Sur le plan technologique et l'état de l'outil de production, Tonic Industrie active dans les filières de la récupération, la production de papier sanitaire, la production de papier pour carton ondulé et tous les domaines de la transformation, qui sont la caisse carton ondulée, le sac petite et moyenne contenance, la boîte pliante, l'imprimerie, etc. Vous avez élaboré un plan d'action afin de remettre en état les équipements de production. Qu'en est-il aujourd'hui ? Nous avons lancé un programme de travail ambitieux avec pour objectif de mettre à niveau l'ensemble des processus de fabrication. Remettre à niveau l'outil de production à travers des investissements d'urgence a été notre priorité, comme doter l'entreprise d'une station de traitement d'eau industrielle, l'adduction d'eau des unités de l'entreprise à partir de la station de dessalement de Fouka ainsi que l'installation d'une ligne électrique. Il faut signaler que nous avons eu l'accord du conseil de participation de l'état (CPE) pour le déblocage de 1,5 milliard DA d'investissements et un programme complémentaire de 807 millions DA. Nous avons, en plus de cela, une quarantaine de projets destinés à améliorer la gestion et la performance au sein de l'entreprise, notamment dans le domaine des systèmes d'information, l'approvisionnement de l'outil de production et celui des ressources humaines par l'établissement d'un règlement intérieur, d'une convention-cadre et d'une nouvelle grille de salaires. Aujourd'hui, nous prévoyons un investissement très important de l'ordre de 10 milliards DA pour acquérir une machine à carton capable de produire 100 000 t par an, avec à la clé la création de 250 postes d'emploi. C'est un investissement qui va répondre aux besoins du pays et même dégager des excédents pour l'exportation en matière de carton plat, qui est utilisé aussi dans l'industrie agroalimentaire, pharmaceutique et chimique. Mais il reste un problème crucial, celui de l'environnement. Nous sommes en train de tout mettre en œuvre pour minimiser les rejets des unités de production et réduire au maximum les nuisances causées à l'environnement. Dans ce cadre, nous avons lancé récemment le projet d'adduction d'eau vers l'usine de Tonic Industrie qui va éliminer, dès sa réception dans un délai de 6 mois, les désagréments causés à Bou-Ismaïl par la circulation de 200 camions-citernes qui approvisionnent nos unités en eau. Ce projet va nous permettre de faire des économies substantielles, d'autant qu'il va réduire notre facture de consommation d'eau de trois fois. En parallèle, un autre projet de station de traitement des rejets industriels vient d'être engagé dans le but de recycler les eaux industrielles, de récupérer les fibres et d'avoir des rejets aux normes OMS après 9 mois de travaux. Le marché national du papier connaît une forte concurrence nationale et étrangère. Comment se positionne Tonic Industrie face à la concurrence ? Le marché national en ce qui concerne la production de papier est presque totalement dépendant des importations. Il l'est moins pour ce qui est de la transformation. Tonic Industrie et le groupe public Gipec sont les seules entreprises qui produisent le papier d'emballage et assurent 10% de la demande dans ce segment. Quant au papier sanitaire et domestique, je pense que Tonic couvre 60% des besoins du marché. Le reste, c'est à dire le papier journal et le carton compact, l'Algérie en importe chaque année pour 500 millions de dollars. Pour ce qui est de la transformation, nous avons une capacité très importante. Tonic Industrie a des positions allant jusqu'à 60% de parts de marché. La récupération et le recyclage du papier utilisé demeure une activité peu développée en Algérie. Que prévoit Tonic Industrie pour promouvoir ce créneau ? La récupération est l'un des créneaux phare de Tonic Industrie. Le papier utilisé est très peu exploité, puisque toute l'activité de la récupération à l'échelle nationale se chiffre à 80 000 t par an sur les 550 000 t consommés. Il faut porter, dans un premier temps, ce taux à 50%. L'effort d'encourager l'activité de la récupération est probant, puisque nous sommes passés d'une trentaine de récupérateurs privés à 130 actuellement, mais il faut qu'il soit un mouvement plus ample que les administrations, les municipalités et les citoyens doivent aider. A. D.