La prochaine élection présidentielle aux Etats-Unis se jouera sans doute sur le dossier irakien. Bush a, désormais, un bon joker : Saddam Hussein… La deuxième guerre du Golfe, qui s'est soldée par la chute de Bagdad, n'a pas seulement occasionné des dommages collatéraux, notamment la mort de milliers de civils irakiens. Elle a induit également des avantages… collatéraux, au profit de George Bush Junior. En l'occurrence, la capture, hier, du raïs déchu, Saddam Hussein, va, à n'en point douter, booster la popularité du président américain qui a particulièrement mauvaise presse ces derniers mois. Et pour cause, il a fait de l'invasion de l'Irak et de la mise hors d'état de nuire de Saddam quasiment son seul programme électoral. Tout comme son père en 1991. Sauf que le fils a, cette fois, réussi là où le père avait lamentablement échoué. L'actuel locataire de la maison-blanche peut, désormais, à loisir, bomber le torse et exhiber fièrement un aussi beau trophée de guerre : la tête de Saddam. Il en a fait une affaire personnelle, parce qu'elle en est véritablement une. Les analystes n'hésitent pas, en effet, à lier l'éventuelle réélection de George Bush, dans une large mesure, à la capture de son ennemi numéro un Saddam Hussein. Ce fut un immense défi pour le président des Etats-Unis, qui traîne déjà, comme un boulet, l'épisode rocambolesque de son élection en 2000. Pour pallier son manque d'aura au niveau interne, Bush a tôt fait de lancer sa croisade contre ce qu'il appelle “l'axe du mal” dans lequel le régime irakien figure en pole position, dans l'espoir de montrer à son peuple qu'il est capable de contrer l'hydre terroriste. Et les attentats du 11 septembre 2001 ont réconforté le premier responsable US et lui ont donné matière à conquérir une légitimité dans la lutte contre le terrorisme et partant (re)gagner les cœurs des Américains qui ne donnaient pas cher de sa peau de président. À une année de la fin de son mandat, Bush sait qu'il joue son va-tout dans la guerre contre l'Irak et qu'il perdrait inexorablement le bureau Ovale dans le cas où il échouerait à mettre la main sur “l'as de pique” qu'est Saddam Hussein, sur lequel il mise beaucoup pour lancer sa campagne électorale. Il n'est d'ailleurs pas fortuit de remarquer que les critiques se font de plus en plus bruyantes à l'intérieur des USA par rapport à sa gestion du dossier irakien, surtout que la situation sur le terrain s'enlise jour après jour avec un cortège imposant de cadavres de soldats américains, mais aussi l'incapacité des Gi's de rétablir l'ordre et la sécurité dans un pays en proie à un chaos indescriptible. George Bush était dans une mauvaise posture, lui qui n'a même pas pu découvrir les fameuses armes de destruction massive sur le sol irakien. Plus grave encore, il a tourné le dos à la légalité internationale en coupant la voie à l'ONU et en provoquant une brouille historique avec les alliés traditionnels des Etats-Unis, notamment la France et l'Allemagne. Mais au moment où, les démocrates commençaient à se frotter les mains pour reprendre la maison-blanche en novembre 2004, voilà que George W. Bush met la main sur le joker tant attendu. Un joker qui risque de peser lourd dans le jeu électoral. Un sésame qui peut lui rouvrir la porte de la maison-blanche pour une nouvelle mandature. Bush, le fils, devrait être aujourd'hui, l'homme le plus heureux du monde. Il vient de gagner, sans doute, une double bataille. L'une, interne, contre ses adversaires du camp démocrate et l'autre, beaucoup plus retentissante, contre Saddam Hussein grâce à laquelle il se construira à coup sûr une aura de battant sur la scène internationale. Il faudrait s'attendre à une montée en flèche de la cote de popularité du président américain après avoir été dénoncé publiquement par l'opinion publique de son pays. En réussissant à avoir la tête de Saddam Hussein, George Bush a certainement sauvé la sienne. H. M.