Comme chaque année, des cellules de crise, des comités interministériels et autres structures ad hoc sont mis en place pour juguler la spirale infernale des prix et le saignement qu'ils provoquent chez les petites et moyennes bourses. Comme toujours, en pareilles circonstances, des mises en garde à l'encontre des spéculateurs sont accompagnées d'effets d'annonce largement diffusés par les médias officiels. Comme à l'accoutumée, les différents ministères se rejettent la responsabilité. “C'est l'économie de marché, les prix sont libres, c'est la loi de l'offre et de la demande, on n'y peut rien". Ce genre d'arguments, avancés souvent par de hauts responsables de l'Etat, tout en recouvrant une part de la réalité, n'en font pas moins l'impasse sur l'autre part, plus difficile à avouer celle-là, parce qu'elle signifie un aveu d'échec. La vérité est que plus de 70% des fruits et légumes, des viandes rouges et blanches commercialisés transitent par des circuits informels et échappent à tout contrôle. L'UGCA a estimé que les prix de ces produits connaîtront une augmentation de 20% durant la première semaine de Ramadhan. Pour sa part, l'association de protection des consommateurs tire la sonnette d'alarme et appelle les Algériens à boycotter les viandes pour endiguer l'inévitable spéculation. La vérité est que l'ouverture débridée du marché, sans instrument de régulation et de contrôle de la puissance publique, a favorisé ce type de pratiques spéculatives et frauduleuses. La vérité est que cette situation tend à devenir structurelle au-delà de la période de Ramadhan et menace la stabilité sociale. En dépit de ce triste constat reconnu par tous, il se trouve aujourd'hui encore des responsables qui estiment que l'incurie et l'anarchie qui caractérisent le marché à la veille du mois sacré de Ramadhan, sont dues à la propension inconsidérée et irrationnelle du consommateur à vouloir tout acheter et à tout prix, créant ainsi les pénuries et provoquant la flambée des prix. Il ne s'agit pas de se tromper de cible en disculpant de fait les barons du commerce de gros, les maquignons et les chevillards pour désigner les citoyens aux lieu et place des vrais coupables. Ainsi, à moins de deux semaines du début du jeûne, les prix des fruits et légumes ont connu une augmentation qui varie entre 50 et 70%. Cette hausse est perceptible y compris au niveau des marchés dits populaires comme ceux de Bab El-Oued, Belouizdad et El-Harrach. Quant aux viandes rouges et blanches, leurs prix s'envolent pour atteindre les 800 dinars/kg l'escalope de dinde, 300 DA/kg le poulet et entre 1 000 et 1 500 dinars/kg les viandes ovine et bovine. Il est vrai que dans tous les pays du monde, à l'approche de fêtes religieuses ou autres, les prix oscillent en fonction de l'offre et de la demande mais, en aucun cas, les commerçants ne fixent des seuils de marge bénéficiaire qui dépassent l'entendement au risque de se faire sanctionner sévèrement par les différents services du contrôle des prix. La balle est dans le camp des responsables en charge du secteur du commerce en dernière instance même si, directement ou indirectement, d'autres secteurs sont concernés par la régulation du marché, à l'instar du ministère de l'Agriculture. A. H.