Dans le milieu des promoteurs immobiliers indélicats, le verdict est tombé tel un couperet. En condamnant lourdement, et pour la première fois à Tizi Ouzou, un de leurs collègues, promoteur privé, la justice n'a sans doute pas fait que rendre à César ce qui appartient à César, en rétablissant les acquéreurs victimes dans leurs droits. Les décisions rendues dans cette affaire, qui serviront sans doute d'exemple, sonnent comme un avertissement à l'endroit de ces nombreux promoteurs qui n'honorent pas leurs engagements envers leurs clients. Cette affaire, qui a défrayé la chronique judiciaire locale, a opposé l'association des futurs acquéreurs des 54 logements LSP à Tala Alam, dans la commune de Tizi Ouzou, à la promotion immobilière Espoir-Promo en charge de la réalisation de ce projet suivant la formule de vente sur plan. L'antenne locale de la Caisse nationale du logement (CNL), le Fonds de garantie et de caution mutuelle de la promotion immobilière (FGCMPI) ainsi que la Dlep de Tizi Ouzou ont été également entendus dans cette affaire. Suite à une première plainte déposée devant la Chambre foncière du tribunal de Tizi Ouzou le 16 novembre 2011, soit après 7 ans de vaine attente de voir réaliser leurs logements chèrement payés, le juge avait ordonné "la poursuite par tous les moyens légaux du projet des 54 logements LSP au profit des victimes et à la charge entière du promoteur", qui a été également condamné à verser 100 000 DA de dommages et intérêts à l'association des victimes. Saisie en appel, la cour de Tizi Ouzou n'a fait que confirmer le verdict du tribunal. Mais les victimes ne s'arrêtent pas à ce stade. Une autre plainte a été déposée contre le propriétaire de la promotion immobilière Espoir-Promo devant la chambre correctionnelle du même tribunal de Tizi Ouzou qui a eu à statuer sur cette affaire le 30 juillet dernier. Poursuivi pour "faux et usage de faux", "escroquerie" et "abus de confiance", le promoteur incriminé a été condamné cette fois en première instance à 5 ans de prison ferme et au payement de 222 350 000 DA. Bien qu'une action en appel ait été introduite devant la cour de Tizi Ouzou, les victimes qualifient déjà la décision du tribunal de "début d'une véritable victoire pour les 54 victimes de ce projet en particulier, et contre tous les promoteurs indélicats qui n'honorent pas les engagements vis-à-vis de leurs clients mais, plus grave encore, ne cessent de les harceler et de les intimider". Très souvent en effet, des cas de retard et même de défaillance dans la réalisation de projets de logements, notamment LSP ou promotionnels, sont fréquemment signalés par les victimes dans des déclarations de dénonciation qui ont rendu certains promoteurs tristement célèbres sur la place publique dans cette région où le secteur du logement en général est déjà frappé par une crise des plus aiguës. Récemment, c'était la commission de l'aménagement du territoire et du développement local à l'APW qui a tiré la sonnette d'alarme dans un rapport sur le logement promotionnel à Tizi Ouzou. "Certains promoteurs vont jusqu'à vendre un même logement plusieurs fois à des acquéreurs différents", a révélé ce même rapport à travers lequel les membres de la commission n'ont pas manqué de déplorer l'amateurisme des promoteurs et les retards dans l'achèvement des projets, non sans souligner qu'"il faut vraiment mettre fin à l'anarchie et la désorganisation de la profession de promoteur immobilier". Sur ce point, une nouvelle loi régissant la profession et le travail des promoteurs immobiliers a été promulguée en 2011 en remplacement de la loi de 1993, mais ses effets étaient peu visibles sur le terrain, notamment à Tizi Ouzou où certains promoteurs continuaient d'imposer leur diktat à leurs clients dont certains attendent la livraison de leurs logements depuis près d'une dizaine d'années. Des enquêtes ont été ouvertes concernant certains promoteurs, assurent certaines sources au fait du dossier, mais jusque-là, seule cette affaire est tranchée par la justice. Une affaire qui aidera peut-être à mettre fin au comportement et au langage de certains promoteurs qui, pour intimider leurs clients qui protestent, vont, nous racontent les victimes, jusqu'à leur faire croire qu'ils bénéficient de la protection de généraux et de juges. S L