D'autres tensions en Tunisie s'ajoutant à des menaces de grève, notamment dans l'éducation, planent à l'approche de la rentrée scolaire prévue le 15 septembre. Des centaines d'internautes ont rejoint les sites Internet, intitulés “Free Sami Fehri", pour défendre le patron de la chaîne tunisienne Ettounissiya TV – producteur de l'émission satirique interrompue de marionnettes contre lequel une décision de justice a ordonné, samedi 25 août, son emprisonnement. Mais d'autres rappellent les liens entre M. Fehri et l'ancien régime de Zine El-Abidine Ben Ali, en diffusant notamment des images de l'ancien président déchu recevant le producteur en juin 2010, six mois avant la révolte populaire. “Je vais en prison dignement", a déclaré samedi M. Fehri sur une radio tunisienne. “Tout cela m'arrive à cause de quatre Guignols", a-t-il ajouté, en dénonçant des pressions contre cette émission critique envers Ennahda, le parti islamiste au pouvoir, qu'il a lui-même interrompue à la veille de son procès. Il est à rappeler que M. Fehri est poursuivi pour des préjudices financiers causés à la télévision tunisienne à l'époque de l'ex-président Ben Ali, avec dix-sept autres personnes, dont un ancien conseiller de la présidence, Abdelwahab Abdallah et le beau-frère du président déchu Belhassen Trabelsi, actuellement au Canada. Ce dernier était associé à M. Fehri dans sa société de production Cactus, qui détenait tous les contrats publicitaires de la télévision tunisienne. Placée sous contrôle judiciaire, nationalisée à hauteur de 51% par l'Etat après la chute de l'ancien régime, Cactus continuait néanmoins à fournir l'essentiel du contenu de la chaîne Ettounissiya fondée en mars 2011. Même s'il jouit du soutien du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), il n'en demeure pas moins que c'est son émission satirique qui lui vaut ses ennuis judiciaires. Le gouvernement, lui, a démenti ces accusations, arguant de la lutte contre la corruption. Lotfi Zitoun, l'influent conseiller politique du Premier ministre Hamadi Jebali, a indiqué, sur la radio Express FM, qu'il s'agissait de “la chute de la première pièce du jeu de dominos", ajoutant que “d'autres dans le secteur des médias et d'autres domaines vont tomber dans les prochaines semaines". Mais cette affaire intervient au plus mauvais moment, dans un climat entre les médias et le gouvernement devenu délétère. Plusieurs organes de presse et des représentants de la société civile accusent les islamistes de chercher à contrôler l'information jugée trop critique et de vouloir placer des fidèles à la tête des médias publics. Ces tensions s'ajoutent à d'autres en Tunisie, alors que des menaces de grève, notamment dans l'éducation, planent à l'approche de la rentrée scolaire prévue le 15 septembre. Tensions sociales d'abord, dues à une mauvaise situation économique, à une inflation repartie à la hausse en juillet et à des investissements industriels en berne, notamment dans le centre du pays où éclatent sporadiquement des troubles. Tensions politiques, ensuite : le président Moncef Marzouki, pourtant allié à Ennahda, a vivement critiqué, vendredi 24 août, ses partenaires islamistes, à l'ouverture du congrès de son parti, le Congrès pour la République (CPR), en les accusant de chercher à accaparer tout le pouvoir. Dans une lettre lue à la tribune par l'un de ses conseillers, M. Marzouki n'avait pas mâché ses mots. I. O.