Le Mujao est sur la route de Mopti aux portes de Bamako. Des islamistes armés ont pris le contrôle de la ville de Douentza, localité située à la limite entre le nord du Mali, sous occupation islamiste, et le sud du pays contrôlé par le gouvernement, ont indiqué des habitants. C'est le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao) qui a investi la ville à l'est de Mopti, réalisant sa menace de franchir la ligne de démarcation avec Bamako. Le Mujao, apparu dans le sillage de la crise malienne, est un véritable ovni. Bien qu'il se soit déclaré comme une nouvelle franchise d'Al-Qaïda dans le Sahel, ce nouveau venu sur une scène sahélo-malienne déjà suffisamment embouteillée par Aqmi et Ansar Dine, n'est entouré que de zones d'ombre. Pour son acte de naissance, ce groupe s'en est pris d'abord à l'Algérie en perpétrant deux attentats-suicides contre les gendarmes dans les wilayas de Tamanrasset et de Ouargla, en enlevant trois humanitaires occidentaux dans les camps de réfugiés sahraouis dans la wilaya de Tindouf puis des Algériens à Gao dont le consul. Le Mujao a exigé une rançon et la libération de membres d'Aqmi arrêtés en Algérie, contre la libération des otages algériens qu'il détient depuis le 5 avril dernier, sous peine de les exécuter. Depuis la diffusion d'une vidéo fixant les revendications du Mujao, rien n'a filtré chez les autorités algériennes de la gestion de cette affaire. Douentza, grand axe de communication avec le sud du Mali, fait donc partie dorénavant du tableau de chasse islamiste : les trois régions de Tombouctou, Gao et Kidal que se partage le dernier né des franchises d'Al-Qaïda dans le Sahel avec Ansar Dine. Deux groupes jihadistes alliés à Aqmi, qui ont évincé leurs anciens alliés rebelles touaregs, sécessionnistes et laïcs avec une facilité déconcertante. Cette avancée intervient alors que Bamako observait un silence sidéral après les missions de “la coalition pour la paix dans le Nord" dans les régions du Nord occupées par les jihadistes. La coalition, qui se présente comme une “initiative citoyenne" pour faire sortir les institutions de transition de leur torpeur et de leur inaction dans ce dossier brûlant, après avoir entendu des représentants de jihadistes, devait conclure le 29 août que seules les autorités gouvernementales peuvent mener des négociations et c'est, bien entendu, à l'Etat de prendre le processus en main. Ajoutant que pour leurs interlocuteurs, la religion est au cœur des discussions et que la charia sera “le centre de toutes les futures négociations". D. B