La reprise des travaux de la plénière a été laborieuse. Des modifications de l'ordre du jour, ajoutées à une phrase assassine de Zerhouni contre le RND, ont semé le trouble dans l'hémicycle. Ahmed Ouyahia et son ministre de l'Intérieur, Nouredine Yazid Zerhouni, ne risquent visiblement pas de passer les vacances ensemble. Hier, à l'Assemblée populaire nationale, lors du débat sur la proposition de loi portant révision de la loi électorale, l'alliance tissée ce week-end autour de la candidature de Abdelaziz Bouteflika n'aura pas été d'un grand secours pour le RND. Et pour cause : Zerhouni, fidèle à sa réputation, ne s'est pas empêché de déclarer dans son allocution devant les parlementaires que “les élections de 2002 ont redonné de la crédibilité à l'Assemblée”. Message : la législature qui l'a précédée, en majorité RND, a été le fruit de la fraude. Lui emboîtant le pas, Mohamed Salah Bouchareb, député du MRN préconise même la publication du rapport d'enquête de la commission sur la fraude diligentée en 97 par le député du FLN, Mustapha Mazouzi. Il n'en fallait pas plus pour provoquer la colère du RND dont les députés ont décidé de quitter précipitamment l'hémicycle. Ceci n'a pas pour autant empêché le débat de se poursuivre. Quelques minutes plus tard, les parlementaires du RND regagnent leur siège et demandent un point d'ordre. “Je demande, en vertu de l'article 76 du règlement intérieur, la suspension de la séance pour consulter le chef de groupes parlementaires”, demande Miloud Chorfi. Motif invoqué par le chef du groupe parlementaire de la formation d'Ouyahia : le non-respect de l'ordre du jour. À vrai dire, la séance de l'Assemblée devait en premier lieu procéder à la validation de qualité de membre au député Abdallah Bennacer (FLN) de la circonscription de Ghardaïa, en remplacement de Abdallah Ammeyar, décédé récemment, ensuite, le vote sur la mise sur pied d'une commission d'enquête sur le refus d'agrément du syndicat Cnapest et enfin le débat général sur la proposition de loi portant révision de la loi électorale. Mais en l'absence du quorum requis, le président de l'Assemblée a décidé de chambouler l'ordre du jour. Un réaménagement que lui confère le règlement intérieur mais que le RND a perçu comme une manœuvre “politique”. “On n'est pas content de l'ordre du jour car il y a des calculs politiques”, a justifié l'ancien ministre (RND), Abdelkrim Harchaoui. Pour certains députés, le RND, dépourvu d'arguments puisque l'article auquel il s'est référé a été supprimé, il y a longtemps, a voulu simplement signifier sa colère à Zerhouni. Pour d'autres, en revanche, le RND cherchait simplement à provoquer un “incident” à consommation médiatique et gêner le déroulement des travaux et par ricochet indisposer Karim Younès, le président de l'Assemblée. En tout cas, c'est ce qu'ont soutenu certains députés du FLN d'autant, ont-ils relevé, que la formation d'Ouyahia a affiché pour la circonstance son alliance avec les 12 députés “redresseurs”. Un avis également partagé par un député indépendant. Après consultation des différents groupes parlementaires, un consensus a été dégagé et la séance suspendue pour ne reprendre qu'une demi-heure plus tard avec l'ordre du jour initial. Lors du débat engagé sur la proposition de loi, certains députés n'ont pas manqué de relever “l'inconstitutionnalité” de certaines dispositions comme celle relevée par Fateh Guerd du MSP à ses yeux destinée à mettre “les garde-fous” en cas d'éventuelle volonté du cercle présidentiel de disqualifier la candidature de Benflis via le Conseil constitutionnel. Des remarques essuyées par un revers de main par le président de la commission Messaoud Chihoub (FLN) qui a prodigué pour la circonstance un cours de droit. Une intervention qui lui a valu l'ovation de l'hémicycle. Fateh Guerd, qui a également loué l'armée, s'est dit favorable à la loi, même s'il a tenté de démontrer en raison du calendrier, le peu de chance dont elle dispose pour passer. En effet, entre les amendements qui vont être introduits, son passage une nouvelle fois à la commission, un autre débat à l'Assemblée, son passage au Sénat qui va intervenir après le renouvellent de ses structures et enfin le temps qu'il faut pour le verdict du Conseil constitutionnel qui va intervenir au lendemain de la convocation des électeurs, la loi n'a pas de chance d'être adoptée. Toutefois, de nombreux députés se sont montrés favorables à cette révision comme Amar Takjout du PT qui a jugé l'initiative louable. Dans son intervention d'ouverture, Yazid Zerhouni a réitéré les réserves du gouvernement concernant la suppression des bureaux spéciaux qui risquent à ses yeux d'engendrer l'abstention alors que pour la remise des listes électorales, il a estimé qu'elle peut porter atteinte aux libertés individuelles. Les travaux se poursuivent aujourd'hui. K. K.