Et ça repart ! La crise qui secoue le FLN depuis plus d'une année ne semble pas connaître de répit, mais risque, au contraire, un nouvel épisode dont l'issue reste incertaine. Hier, redresseurs et contestataires avaient prévu d'organiser une action de protestation au sein de “l'appareil", le siège central du parti. Le patron contesté, Abdelaziz Belkhadem, a pris ses précautions, en s'évaporant du siège. Certains le disent à Relizane, alors que d'autres affirment qu'il “arrivera d'un moment à l'autre". En tout cas, Belkhadem n'a rien laissé au hasard. Une centaine de jeunes, dont les têtes n'ont rien à voir avec le militantisme, ont passé la nuit dans la cour du parti. Hier, ils étaient affaissés sur les chaises, rôdant comme des zombies dans les couloirs. On se croirait dans une gare routière d'un coin reculé du pays ! Seule distinction, ils avaient, en guise de badge, le portrait de Belkhadem. Et les cadres du parti ? Seulement une dizaine de membres du comité central, encore fidèles au SG, se terraient dans les bureaux et demandaient aux journalistes les nouvelles de l'autre camp. Dehors, la route est fermée à la circulation. Un impressionnant dispositif sécuritaire est déployé pour empêcher les contestataires d'y parvenir. Un député est en colère. “Je suis député, j'ai le droit d'accéder au siège de mon parti." Un autre sénateur, visiblement intenable, a voulu forcer le cordon de sécurité. “On nous frappe, on nous traite comme des voyous, alors que les voyous sont ceux qui occupent illégalement notre siège en ce moment." Les ex-ministres El-Hadi Khaldi et Abdelkrim Abada tentent de le raisonner. “On ne va pas tomber dans leur piège. Belkhadem veut nous pousser à l'affrontement." Ils décident de déposer une plainte auprès du procureur de la République pour “occupation illégale du siège du parti par des jeunes armés de couteaux et de gourdins". Ils veulent les déloger par la force publique, mais dans le respect de la loi. Certains membres du comité central sont sceptiques. “Regardez où est-ce qu'on nous parque, dans le jardin du Paradou, entouré d'un cordon sécuritaire, alors que notre siège est occupé par des baltaguiya !" Une centaine de membres du comité central sont sur place, des sénateurs, d'anciens ministres, mais aussi d'anciens mouhafadhs. Mais au moment où Abada s'apprêtait à lire un communiqué au nom des contestataires, un groupe de jeunes, venu de Bourouba, emmené par un responsable d'une organisation juvénile, fait irruption dans le jardin et scande des slogans, tantôt politiques, tantôt sportifs, ne sachant même pas à qui ils avaient affaire. Il aura fallu toute la sagesse des anciens pour ramener un semblant de calme. Abada prend le mégaphone et rappelle les raisons de ce mouvement de protestation. Il affirme que le fils de Belkhadem, Abderrahmane, a loué des jeunes, à 5 000 DA par tête, pour passer la nuit au siège du parti. Pour Abada, “il est malheureux que nos enfants soient exploités de la sorte et jouent aux baltaguiya". La plainte a finalement été déposée et les contestataires, qui ont longuement palabré avec les officiers de police présents sur place, comptent sur ces derniers pour qu'ils transmettent à la justice toutes les preuves matérielles de l'intrusion des “baltaguiya" dans le siège du parti. Une bataille juridique qui commence, mais surtout un bras de fer qu'ils comptent mener jusqu'au bout en organisant des manifestations quotidiennes devant “l'appareil", ce qui ne va pas plaire du tout aux riverains, ni aux usagers du jardin du Paradou et constituera un véritable casse-tête pour les forces de l'ordre. Est-ce une façon de faire bouger les choses en haut lieu ? Peut-être. En tout cas, Belkhadem, lui, ne semble pas être près de reculer d'un iota. Au contraire, en faisant appel, de nouveau, aux “baltaguiya", il lance un défi, non seulement à ses adversaires, mais aux forces de l'ordre. A. B.