Le professeur Pierre Chaulet, militant anticolonialiste acquis à la cause de l'Indépendance de l'Algérie, a été accompagné, hier à Alger, par une foule nombreuse, à sa dernière demeure. Pierre Chaulet a été enterré, hier, au cimetière chrétien d'El-Madania, après l'office religieux célébré, la matinée, à la Maison Diocésaine à El-Biar, sous la direction de l'ancien archevêque d'Alger et ami du défunt, monseigneur Henri Teissier. Comme il l'a souhaité, Pierre Chaulet a été enterré aux côtés de son compatriote, également militant de la cause algérienne, Henri Maillot, “mort au champ d'honneur, le 5 juin 1956", comme il est écrit sur sa tombe. La procession du cortège funèbre, de la Maison Diocésaine au cimetière en passant du côté de la présidence de la République, s'est déroulée sous les youyous des femmes et les applaudissements des citoyens. Cela traduit sans doute le grand respect que vouent les Algériens à ce patriote qui a accompagné la “Révolution algérienne dans toutes ses phases", pour paraphraser les propos de Me Ali Yahia Abdenour, doyen des militants pour la défense des droits de l'Homme, présent au cimetière. “Pierre Chaulet est un héros de la Révolution algérienne. Il a été dans toutes ses phases, de 1954 à 1962, puis après l'indépendance. Il faut retenir qu'il est un vrai Algérien", témoigne, en effet, le fondateur de la Laddh. À l'intérieur du cimetière, la foule devient plus compacte. Les éléments de la Protection civile qui portent le cercueil du défunt, drapé de l'emblème national, progressent lentement dans les allées menant vers la tombe “réservée" à Pierre Chaulet, tout au fond du cimetière où repose, depuis 1956, son compagnon Henry Maillot. L'émotion était alors à son comble et se lisait sur les visages des présents qui regrettent le départ d'un éminent professeur en pneumologie, précurseur de la lutte contre la redoutable maladie de la tuberculose. Le professeur Chaulet est désigné expert de la tuberculose auprès de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) depuis 1981, à ce jour. Ayant exercé au CHU de Béni Messous, de 1967 à 1994, il est le principal artisan de l'éradication de cette maladie en Algérie. Ceci, outre son grand parcours de militant anticolonialiste et défenseur des droits de l'Homme. Et d'aucuns au cimetière ne veulent rater l'occasion d'immortaliser, avec une prise de photo, cet événement regrettable, mais historique. En effet, les flashes n'ont pas cessé de clignoter de toutes parts, jusqu'à l'ensevelissement du cercueil, sous le regard notamment de ses compagnons de guerre, à l'instar de Me Ali Haroun, ancien condamné à mort, la moudjahida Louisette Ighil Ahriz, ou encore Saïd Abadou, président de l'Organisation nationale des moudjahidine. Parmi les officiels, étaient présents trois ministres en exercice, Mohamed-Chérif Abbas, ministre des Moudjahidine, Abdelaziz Ziari, ministre de la Santé et de la Réforme hospitalière, Amara Benyounès, ministre de l'Aménagement du territoire, de l'Environnement et de la Ville, ou encore Saïd Bouteflika, frère et conseiller du président de la République. Il y avait, en outre, plusieurs anciens ministres et autres personnalités de différents horizons, dont Noureddine-Yazid Zerhouni, ancien ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Saïd Barkat, ex-ministre de la Solidarité, et Rédha Malek, ancien Premier ministre. Ce dernier, qui a eu à connaître de près le professeur Pierre Chaulet, pendant et après la Révolution, a, auparavant, apporté son témoignage, à la messe, sur le parcours révolutionnaire du défunt et sur sa grande contribution après l'Indépendance à l'édification de l'Etat Algérie. “Il était notre ami et notre frère de combat. De par son amour de la justice et de l'équité, je n'ai jamais vu Pierre dévier de sa ligne politique. Il avait de la rectitude envers soi et envers les autres. C'est ainsi qu'il a forgé son caractère de militant et du futur citoyen algérien. Il avait créé un pont entre la communauté européenne et les Algériens. Il s'est dressé contre le système colonial fondamentalement injuste (...). Il a apporté à la Révolution de l'ouverture sur l'universalisme. Après l'Indépendance, il a révélé la diversité de ses dons pour contribuer à la fois à la réforme politique pour l'édification de l'Etat-nation algérien et à la défense des droits de l'Homme. Il avait notamment milité pour le principe de permettre l'accès aux soins pour tous", a rappelé Rédha Malek, plongeant son assistance dans une profonde émotion. F A