La Conférence internationale sur les opportunités d'investissement en Algérie dans les hydrocarbures non conventionnels (HNC) et les énergies non renouvelables (E/R), tenue du 4 au 6 novembre 2012 à Alger, est un événement particulier à plus d'un titre. D'abord du point de vue du casting. Il réunit les leaders des plus grands opérateurs énergétiques et groupes industriels européens et nord-américains avec les premiers responsables institutionnels et opérationnels du secteur de l'énergie et des experts algériens de premier plan. Ensuite du point de vue du timing. Cet événement a lieu au lendemain de l'approbation et du début d'exécution du programme national des énergies renouvelables et au moment où simultanément l'Assemblée populaire nationale (APN) examine les amendements à la loi sur les hydrocarbures pour la rendre plus attractive. Enfin du point de vue de l'objectif qu'elle se fixe. Il s'agit d'analyser et de faire le point sur les conditions technologiques, économiques et financières de mise en œuvre des programmes algériens de développement des hydrocarbures non conventionnels (essentiellement le gaz de schistes) et des énergies renouvelables (essentiellement le solaire). C'est l'ensemble des segments de la problématique qui y ont été visités : examen des innovations en matière d'E/R, obstacles potentiels au développement des HNC, insuffisance d'exploration dans l'amont hydrocarbures, formules spécifiques de partenariats. Invité à faire une communication dans cette conférence, mon propos visait à identifier, du point de vue algérien, les facteurs d'incertitude de la démarche dans ces deux déclinaisons HNC et E/R et à esquisser les contours d'un nouveau paradigme pour réduire l'asymétrie entre les acteurs énergétiques locaux et ceux du reste du monde. Au préalable, il faut bien convenir que le débat d'opportunité sur la mise en valeur des E/R au lieu des HNC est sans objet, car nous avons besoin des deux. En effet, les projections à moyen terme des besoins énergétiques (doublement en 15 ans) et financiers (exportations hors hydrocarbures insuffisantes) seront tels que l'on ne peut financer notre transition économique et énergétique que si l'on élargit nos réserves d'hydrocarbures conventionnels et non conventionnels. Ceci dit, j'indique que les facteurs d'incertitude, concernant les E/R, sont à la fois de nature technologique et économique. De nature technologique, car les grandes usines à concentration solaire (CSP) qui produisent de l'énergie électrique de masse sont encore au stade expérimental. De nature économique car les tarifs d'électricité en Europe, client quasi unique ne disposant pas encore d'un réseau continental intégré, sont prisonniers de tropismes nationaux (électronucléaire ou charbon générant une rente énergétique) qui les bloquent à des niveaux n'assurant pas encore un retour sur investissement. Cela en dépit du volontarisme affiché par l'Union européenne (UE) fixant l'objectif des 3 fois 20 (20% d'E/R, 20% de gain d'énergie sur un point de PIB, 20% d'économie d'énergie) à l'horizon 2020. Reste la partie de couverture énergétique nationale pouvant provenir des E/R, essentiellement l'électrosolaire d'origine photovoltaïque et CSP dont il est envisagé des mécanismes de promotion et de soutien. à l'inverse, le modèle économique de mise en valeur des HNC a fonctionné aux Etats-Unis à telle enseigne que ce pays s'est affranchi de sa dépendance au gaz naturel liquéfié (GNL) importé. Mais il est vrai aussi que, du point de vue technologique, des avancées sont encore attendues pour en réduire encore plus les risques réels de pollution inhérents à leur exploitation à grande échelle. à l'inverse, les E/R, notamment l'électrosolaire pour ce qui nous concerne, n'engendrent pas de risques environnementaux majeurs, mais n'offrent pas encore les mêmes champs de visibilité que les HNC sur les retours d'investissement (coûts et prix). Quant au nouveau paradigme, il est à construire pour ces deux sources d'énergie dans une démarche gagnant-gagnant. Il n'est plus tolérable pour les économies des pays exportateurs d'énergie de continuer à reproduire la situation industrielle, ayant prévalu historiquement pour l'exploitation des hydrocarbures, dans laquelle tout vient de l'étranger : engineering, biens d'équipement, montage et même pièces de rechange et services d'accompagnement. Les nouvelles formules de partenariat devront inclure, au-delà d'un partage raisonnable du risque et de la rente, le développement de capacités d'intervention locales privées et publiques le long de toute la chaîne de valorisation des E/R et des HNC. Des pays émergents comme le Brésil, devenu leader mondial dans l'exploration et la production d'hydrocarbures offshore, ont déjà montré la voie. Rien ne nous empêche de la suivre. M. M.