Face aux récentes mutations énergétiques internes et surtout externes, il est clair qu'il faudra à la fois opérer des ajustements sur le contenu de la politique énergétique et en corriger l'image car la perception du secteur -chez nous et à l'étranger- est brouillée depuis quelque temps. Ces deux actions complémentaires devraient porter à mon sens sur trois plans : l'élargissement des réserves et la stimulation de la production des hydrocarbures, y compris des hydrocarbures non conventionnels, le développement progressif et maîtrisé des énergies renouvelables et enfin la rationalisation effective du modèle de consommation énergétique. Commençons par la question la plus préoccupante et la plus urgente : celle de l'élargissement des réserves et de la stimulation de la production des hydrocarbures. Il faudra d'abord tirer les premiers bilans des effets de la dernière loi des hydrocarbures sur l'attractivité de notre amont hydrocarbures. Nous devons convenir que les deux premiers appels d'offres en matière d'octroi de blocs d'exploration et de production n'ont pas atteint les résultats attendus. Ainsi se contenter seulement d'affirmer que notre potentiel de découvertes est énorme, avec des bassins sédimentaires de 1,6 millions de km2, ne suffit plus pour stimuler la demande internationale. Aussi cette situation appelle sans plus attendre deux actions correctives. La première est la prise en charge de tout ou partie de ces périmètres par Sonatrach elle-même en tant qu'opérateur unique, à défaut de trouver des partenaires. Cette dernière devra, pour ce faire, développer davantage ses capacités d'exploration, de forage et de production et celles de ses filiales de services pétroliers. C'est sans doute pour cela que la Sonatrach projette d'investir 71% des 69 milliards $ de son programme d'investissement 2010-2014 dans l'amont hydrocarbures pour reprendre les chiffres donnés au 21ième Congrès Mondial de l'Energie tenu en septembre dernier à Montréal (WEC 2010). La seconde action devrait porter sur l'identification et le traitement des raisons profondes pour lesquelles l'attractivité de l'amont hydrocarbures a sensiblement diminué, après que l'Algérie ait été en 1998 le premier pays « découvreur » au monde sous l'empire de la loi de1986 révisée en 1991. Il faudra bien se résoudre un jour à réajuster de façon pragmatique le cadre institutionnel surtout si l'on veut attirer des partenaires de premier plan dans la recherche, l'exploration et la production de gaz non conventionnel et dans les techniques avancées de récupération d'huiles. Le deuxième volet de l'ajustement de la politique énergétique devrait porter sur la promotion progressive et maîtrisée de la part des énergies renouvelables dans le panier énergétique pour 2020 et 2030 en termes de couverture des besoins nationaux mais aussi d'exportation. Pour traiter convenablement cette question complexe et lourde de conséquences du contenu du panier énergétique, il faudra commencer par la décomposer en éléments simples. A cet égard il me semble qu'une séparation ,en matière de démarche, devrait être faite entre les programmes dédiés à la satisfaction des besoins nationaux et ceux dédiés pour l'essentiel à l'export. Ainsi par exemple pour le solaire, les éléments de politique publique concernant la satisfaction de besoins locaux résidentiels et industriels seront forcément différents de ceux portant sur l'exportation massive d'électricité solaire. Cela du fait aussi bien des délais respectifs de maturation des projets, de l'asymétrie des investissements requis, des soutiens légitimes du marché national , des incertitudes sur la prévisibilité à long terme des prix de l'électricité sur des marchés européens garantissant un retour sur investissement. Un dernier point et non le moindre concernant l'électricité solaire, c'est celui du changement de paradigme requis en la matière par l'Algérie notamment. Il s'agit des conditions technologiques et industrielles de production de cette énergie. Si pour les énergies carbonées, les pays exportateurs, à de rares exceptions, ont historiquement peu bénéficié des retombées technologiques et industrialisants chez eux, pour le solaire, dont la durée de vie est infinie, le paradigme devrait changer. Le développement de la recherche, l'engineering des équipements et des installations ainsi que la production de composants devront être partagés équitablement entre institutions scientifiques et groupes industriels des pays exportateurs et des pays consommateurs. Il me semble qu'il faudra encore donner du temps au temps pour que cela soit accepté par nos partenaires européens. Enfin dernier volet de l'ajustement, la rationalisation du modèle national de consommation énergétique. En vérité pour ce point on sait, depuis son adoption au début des années 80, ce qu'il faut faire. Mais de façon récurrente, le retard dans les infrastructures de distribution, le poids des intérêts et même les tropismes culturels et sociaux ont renforcé les différentes sources de gaspillage d'énergie. Finalement le paramètre qui fera bouger les lignes sera celui de la tarification et des prix. On y viendra de façon progressive mais inéluctable. Je conclus par la nécessité de résorber le déficit d'image pour ce secteur comme pour les autres. La clarté, la lisibilité et la stabilité des ajustements à opérer dans la politique énergétique vont y contribuer. Une bonne communication politique et médiatique aussi.