Un ouvrage composé d'articles et de réflexions de l'homme politique et nationaliste qu'était Imache Amar, originaire d'Aït Mesbah à Beni Douala, vient de paraître aux éditions Odyssée de Tizi Ouzou. L'ouvrage est préfacé par l'historien Benjamin Stora spécialiste reconnu de l'histoire de l'Algérie contemporaine. La compilation traite des faits politiques survenus aussi bien sur la scène politique du mouvement national algérien que sur une vision africaine et continentale de la question de la décolonisation. La trame de l'évolution chronologique des événements ainsi notés après la Première Guerre mondiale par l'auteur renseigne avec force détails sur les contours de la marche vers la naissance de l'Etat algérien indépendant dans le cadre d'une Afrique décolonisée. Le premier article paru en 1937, titre du livre, s'intitule “Algérie au carrefour : la marche vers l'inconnu" est une introduction à l'injonction du Moyen-Orient dans l'éveil politique algérien. Dans l'article “L'Afrique de l'angoisse" publié en 1939, Imache Amar déclare que “tous les Africains doivent s'unir pour combattre l'impérialisme en Afrique". Plus tard et conscient de l'importance des langues africaines en tant que rapport de force dans l'action anticoloniale des mouvements africains, Imache Amar tente d'introduire le débat sur le sujet lors du Congrès panafricain tenu en 1945 à Manchester en présence des révolutionnaires africains à l'image de Nkrumah et Jomo Kenyatta. L'article “L'heure de l'élite" paru en 1946 traite du rôle primordial à accorder à l'élite comme intelligence et force incontournable dans la conception du combat libérateur au plan idéologique et politique, seul garant de l'évitement de toute forme d'amateurisme mais surtout l'hégémonie du zaïmisme qui guettait déjà le nationalisme algérien. Suivra un article intitulé “Cyclone sur le monde" traitant de la terrible Deuxième Guerre mondiale et ses effets en Algérie comme en Afrique avec une série de réflexions parues dans la revue “El-Oumma" organe central de l'Etoile Nord-africaine dont il est cofondateur. L'ouvrage se termine par la “Lettre d'adieu" qu'Imache Amar adressera en 1947 aux ouvriers algériens établis en France, dans laquelle et en désespoir de cause, le nationaliste constate que ses avertissements sur les risques de la marginalisation de l'élite algérienne étaient devenus, malheureusement, une réalité. Tout au long de la lettre, Imache Amar dénonce une situation politique déplorable qui a paralysé le mouvement national dominé et étouffé par l'absolutisme et l'autoritarisme dont les dirigeants de l'Algérie indépendante hériteront, hélas, et conduiront le pays à la catastrophe que nous connaissons aujourd'hui. Pour rappel, Imache Amar, alors émigré en France dans les années 1900 en tant qu'ouvrier spécialisé, est le fondateur du Comité des ouvriers nord-africains (Cona), créé le 7 décembre 1924 à Paris, après un regroupement d'émigrés algériens. Comment une telle illustre figure du mouvement national a-t-elle pu être ainsi occultée par l'histoire officielle ? A-t-on voulu effacer Imache Amar de la cour des grands hommes politiques algériens pour le seul fait qu'il revendiquait aussi la berbérité du pays ? A. A. [email protected]