Dans cet entretien, cet expert financier, membre du Forum des chefs d'entreprises, aborde les allègements fiscaux en direction des entreprises prévus par loi de finances 2013 adoptée par les deux chambres du Parlement ainsi que des propositions du FCE pour élargir l'assiette fiscale. Liberté : Quelle lecture faites-vous des dernières mesures relatives aux avantages fiscaux apportés par la loi de finances 2013 ? Lies Kerrar : Il n'y a pas de mesures révolutionnant le cadre fiscal dans le projet de loi de finances 2013. On peut faire une rapide synthèse des dispositions de cette loi en ce qui concerne l'impact sur les entreprises. Le plafond de l'IFU a été relevé à 10 millions de DA. C'est positif et le FCE demandait son relèvement depuis plusieurs années. Imputation de l'excédent de versement en matière d'IBS sur les prochains paiements d'acomptes provisionnels au titre du même impôt. C'est positif et c'est en réalité la correction d'une situation qui perdurait depuis longtemps et qui était injuste et anormale. Les entreprises paient leur IBS à l'avance par acomptes sur la base du résultat de l'exercice précédent. Lorsque ces acomptes étaient excédentaires, ces derniers n'étaient pas imputables aux prochains paiements, et l'entreprise devait continuer à payer des acomptes et avait faire des démarches longues et complexes pour récupérer cet excédent. En pratique cela pouvait prendre plus d'un an pour récupérer l'argent et nécessiter plusieurs démarches. C'est cette situation anormale et injuste qui a été ainsi corrigée. Institution d'une avance de 50% en matière de remboursement de récit TVA accordée aux entreprises de bonne conduite et moralité, relevant de la DGE (Direction des grandes entreprises). Là aussi, il s'agit d'une avancée dans le sens de la correction d'une situation dommageable pour la trésorerie des entreprises : des montants de dettes du Trésor envers les entreprises provenant de la TVA payée en trop qu'il était long et complexe de recouvrer. Cette mesure est une avancée, certes. Elle ne permet cependant pas de régler la problématique. Elle est en effet réservée aux grandes entreprises, qui relèvent de la DGE. Aussi, ce n'est pas tant le processus de remboursement qui a été amélioré et accéléré, mais l'institution d'une avance en attendant le remboursement. C'est une bonne chose, comme mesure provisoire. Mais il est évident que nous devons travailler sur le fonds pour s'assurer que le processus de remboursement soit réellement accéléré effectivement et que toutes les entreprises, petites et grandes, puissent être traitées équitablement. La centralisation du paiement de la TAP, que le FCE réclamait depuis des années, est aussi une chose positive. Il était en effet contreproductif et consommateur, inutilement de temps et de ressources, de faire payer la TAP à plusieurs endroits. Exclusion des investisseurs partenaires avec les sociétés nationales de l'obligation de réinvestissement de la part des bénéfices correspondant aux exonérations ou réductions accordées, lorsque les avantages consentis ont été réinjectés dans le prix des biens et services finis produits. C'est une disposition salutaire qui règle plusieurs problématiques apparues en 2009 avec l'institution de l'obligation de réinvestissement des avantages fiscaux. C'est positif, bien qu'il ait fallu 3 ans (2009-2012) pour régler ces problématiques. Cette situation nous interpelle sur l'applicabilité des loi. Le FCE a proposé une méthodologie qu'il serait salutaire d'adopter dans le processus de préparation des lois. Il s'agit d'accompagner chaque proposition de dispositions légales, d'une étude d'impact qui clarifie les objectifs et impacts visés. Cette étude permet aussi de vérifier l'applicabilité des mesures. Nous avons eu ces dernières années plusieurs dispositions législatives qui posent de réels problèmes d'applicabilité. Il y a donc quelques mesures positives dans la loi de finances 2013. Quel est l'impact de ces mesures sur l'ensemble de l'économie nationale ? Il y a quelques mesures positives. Cependant notre défi et l'enjeu est de mener une véritable réforme pour construire un environnement des affaires favorisant la compétitivité de nos entreprises. Cela représente un véritable travail de fonds. La banque mondiale et PWC viennent de publier le rapport “Paying taxes 2013". Même si ce classement est basé sur une méthodologie particulière, le classement de l'Algérie en termes de pression fiscale et de procédures nous interpelle sur les efforts que nous devons faire. Comment peut-on booster l'économie, surtout qu'il existe nombre de mesures déjà en vigueur ? Le FCE propose une approche et méthodologie visant l'augmentation de l'assiette fiscale. Il s'agit, d'une part, de travailler à favoriser la compétitivité des entreprises pour qu'elles puissent créer des richesses, et donc de pouvoir à terme payer plus d'impôts. D'autre part, d'augmenter le nombre des contribuables en favorisant la migration de l'informel vers le formel. C'est dans le cadre de cette approche mobilisant tout le monde vers les mêmes objectifs que nous pourrons atteindre des résultats significatifs.