Alors que la convocation du corps électoral n'est plus qu'une question de jours, la tension entre le clan présidentiel et les candidats annoncés et potentiels s'attise. La sortie médiatique du président Zeroual, qui ajoute sa voix à celle de ceux qui revendiquent le départ du Président, comme préalable à la tenue de l'élection présidentielle, est une position majeure, qui ne manquera pas de peser dans le rapport de force. Bouteflika, quant à lui, fait mine d'ignorer ces remous polico-médiatiques et continue sa série de visites, à la recherche de la caution populaire. Dans ce méli-mélo, où l'armée est partagée entre le devoir de neutralité et celui de ne pas demeurer indifférente, le débat, le vrai, autour des projets de société est le grand absent. Dossier. “Si je n'affirme pas davantage, c'est que je crois l'insinuation plus efficace”, dit l'adage. Une autre note et non des moindres vient s'ajouter à la partition contre Abdelaziz Bouteflika. Même s'il ne le cite pas nommément, l'ex-homme fort du pays, Liamine Zeroual, n'en suggère pas moins, dans des formules sibyllines, à l'actuel locataire d'El-Mouradia de “céder sa place” au nom du sacro-saint principe de l'alternance. “L'alternance demeure, de mon point de vue, une noble vertu de la culture politique en mesure d'ouvrir de nouvelles perspectives pour l'avenir de l'Algérie”, note-t-il dans un communiqué rendu public non sans préciser que “la culture des miracles et du mythe de l'homme providentiel n'est plus de ce temps”. Si l'on ne peut objectivement, au regard du contexte, du timing mais également du statut de l'homme, ne pas y percevoir une “voie autorisée de la grande muette”, il est permis cependant de se demander de quelle manière Bouteflika doit “partir”. À l'évidence, rien de plus indiqué qu'un scrutin transparent où les règles du jeu démocratique soient respectées. Et Zeroual ne manque pas de le rappeler en exprimant le vœu que le peuple “impose, à travers sa détermination, le respect du choix de sa souveraineté de façon pacifique”. Sauf que l'ex-Président ne précise pas si, à ses yeux, les conditions d'organisation d'un scrutin libre et transparent sont réunies. Avant lui, d'une façon qui ne souffrait d'aucune équivoque, d'autres voix ont également appelé au départ de Bouteflika. C'est le cas notamment du général à la retraite et néanmoins candidat, Rachid Benyellès, de l'ex-chef de l'Exécutif Benbitour et avant-hier encore des députés du FLN. D'autres personnalités de renom ont même entamé une pétition dans l'objectif de disqualifier l'actuel chef de l'Etat accusé de “dérives bonapartistes”. Bref, à mesure qu'approche l'échéance fatidique de l'élection présidentielle, la pression sur Abdelaziz Bouteflika augmente et nombreux, du moins au sein de la classe politique, sont ceux qui caressent le souhait de le voir abandonner les rênes du pouvoir au moment où, lui, observe un silence abyssal. Comment doit-il partir ? Hormis le FFS, Chérif Belkacem, le MDS qui préconisent l'organisation d'une transition, seule à leurs yeux à même d'assurer l'événement d'un nouvel ordre institutionnel, le reste des postulants parmi ceux qui revendiquent “la tête” de Bouteflika ne donne pas “la recette” pour l'acculer à emprunter la porte de sortie. Même si leurs vœux s'adressent en premier lieu à la population, on aurait sans doute tort de ne pas déceler dans leurs incessants appels quelques messages à la grande muette. Car, à vrai dire, ils ne se font pas d'illusions sur l'issue des élections avec un Président qui dispose de tous les leviers du pouvoir et qui, de surcroît, va organiser un scrutin avec un Exécutif qui lui est inféodé. Une perspective qui va exacerber immanquablement des tensions. Par quelque côté donc que l'on prenne la question, force est d'admettre que l'on est face à une situation où l'armée semble plus que contrainte à “entrer dans l'arène” même si elle rappelle à qui voudrait bien l'entendre qu'elle restera “neutre”. À moins d'un jet de tablier comme certains prêtent l'intention à Bouteflika, un homme du reste imprévisible, ou encore de vraies garanties pour assurer un scrutin transparent, les développements de la scène politique n'augurent pas de lendemains meilleurs. Incontestablement la prochaine échéance électorale s'annonce “sale” pour reprendre l'expression d'un leader d'une formation politique, aujourd'hui, devenu ministre de la République. K. K.