On aurait aimé que l'arrivée des islamistes au pouvoir en Tunisie à la faveur du printemps arabe aboutisse à l'amorce d'un processus démocratique, certes long et difficile, mais porteur d'espoir. On aurait aimé voir la Tunisie verte s'épanouir dans l'ère de la liberté d'expression et de la démocratie et consolider le bel héritage Bourguiba. On aurait aimé avoir tort d'avoir prédit le chaos islamiste au lendemain des révolutions arabes. Malheureusement, ce n'est pas le cas. L'assassinat de Chokri Belaid, figure de proue de la mouvance démocrate en Tunisie nous rappelle étrangement de mauvais souvenirs. Du déjà vu pour nous algériens qui ont eu à résister et lutter contre l'insurrection islamiste du parti dissous et ses branches armées terroristes. L'occident avait reproché à l'Algérie d'avoir arrêté le processus électoral en 1992, en qualifiant cette mesure d'extrême qui a permis de justifier les attentats terroristes. Mais si les événements du 11 septembre 2001 ont donné raison à l'Algérie qui a lutté seule contre l'un des mouvements terroristes les plus barbares qu'a connu la planète, les révoltes du printemps arabe ont changé la donne. Bien évidemment pour des raisons stratégiques, l'occident a soutenu les fondamentalistes dans la prise du pouvoir. De Rabat au Caire en passant par Tunis sans oublier la Libye qui sombre dans une anarchie indescriptible, la situation n'est pas meilleure. Mohamed Morsi, président d'Egypte a tenté de concentrer tous les pouvoirs entre ses mains mais l'opposition des démocrates et la colère de la rue ont fait reculer sa tentation impériale. La Libye semble devenir un véritable sanctuaire des terroristes. L'attentat perpétré contre le consulat américain de Benghazi en septembre dernier suivie de l'opération spectaculaire de janvier contre la base gazière de Ain aménass dans le sud est algérien menée par des djihadistes venue de Libye confirment cette crainte de plus en plus exprimée par l'Algérie sur l'instabilité chronique de son voisin de l'est.En Tunisie, les salafistes ont déjà annoncé la couleur en s'attaquant aux hôtels prés de Hammamet et contre les débits de boissons alcoolisés et les bars. Mais l'assassinat politique du secrétaire général du parti des démocrates patriotes unifié laisse présager le pire. Pourtant, le parti islamiste Ennahda de Rachid Ghannouchi, est au pouvoir. Pour ceux qui prétendaient que l'arrêt du processus électoral en Algérie a donné raison aux islamistes pour passer au terrorisme, il serait intéressant d'entendre aujourd'hui leurs arguments concernant la Tunisie. Les islamistes sont au pouvoir mais cela n'a pas suffit pour neutraliser leur violence légendaire. Comme quoi, un islamiste ne peut respecter le jeu démocratique que lorsque ce dernier lui permet d'accéder au pouvoir. Une fois acquis, la nature reprend ses droits. Reste la question déterminante : que fera Ennahda ? Condamnera-t-il le terrorisme ? Mènera-t-il une lutte antiterroriste contre les salafistes qui sont la base même de son parti ? L'Algérie qui a connu les affres de la violence islamiste restera solidaire avec le peuple tunisien dans sa bataille pour la démocratie, dans sa bataille pour la vie. S T