À quoi sert d'annoncer la mort d'un chef terroriste si ce n'était pas le cas ? À qui profite la médiatisation d'une prétendue élimination de Mokhtar Belmokhtar et d'Abou Zeïd, principaux responsables d'Aqmi dans le Sahel ? L'armée tchadienne la revendique, mais dans la pratique, aucune preuve n'est venue confirmer la mort des deux dangereux terroristes. N'Djamena avance comme argument qu'elle ne peut pas exposer les corps pour des considérations religieuses et Paris, engagé dans la guerre contre le terrorisme pour libérer le nord du Mali, ne veut toujours pas s'avancer sur la mort de Belmokhtar et d'Abou Zeïd. Il y a dans cette polémique quelque chose de malsain. Si l'on considère que l'élimination des deux chefs terroristes serait un grand coup dans la lutte antiterroriste, on est en droit de s'interroger pourquoi alors la France, qui est engagée militairement pour libérer le nord du Mali des groupuscules islamistes, ne veut pas l'assumer. À moins que le sort de ses otages détenus au Niger et au nord du Cameroun ne soit la raison principale de cette censure. Dans la guerre contre le terrorisme qui a évolué depuis les vingt dernières années, l'aspect propagandiste a énormément pris de l'ampleur. Combien de fois des chefs terroristes ont annoncé leur propre mort pour la démentir plus tard à travers l'organisation d'attentats spectaculaires qu'ils revendiquent eux-mêmes. Et combien de fois des terroristes ont été donnés pour mort alors qu'ils sont en état d'arrestation par les services de sécurité afin que ces derniers puissent faire les investigations et recoupements nécessaires pour mettre la main sur l'ensemble des éléments du groupe. Ajouter à cela le développement d'Internet, ce qui n'existait pas il y a vingt ans, à travers lequel les réseaux djihadistes ont pu non seulement recruter des jeunes désœuvrés, mais mener des campagnes de désinformation et de manipulation. Dans le cas de Belmokhtar et d'Abou Zeïd, les Tchadiens ont, semble-t-il, tiré trop vite sans arriver à l'objectif escompté.