Trois jours à peine après sa nomination en Conseil des ministres, Aïssa Dermouche, nouveau préfet du Jura issu de l'immigration est la cible d'un attentat à la bombe. Dans la nuit de samedi à dimanche, une charge explosive a détruit son véhicule stationné tout près de son domicile sis, avenue Camus, dans le quartier résidentiel de Nantes. La déflagration a été entendue à l'aube, alors que le préfet dormait chez-lui à quelques mètres de l'emplacement de la voiture. Selon les premières impressions des enquêteurs, il s'agirait “de toute vraisemblance d'un acte criminel”. Qui a voulu tuer le préfet Dermouche. Selon sa famille, rien ne préméditait cet attentat. “Il a reçu des milliers de messages de félicitations, mais jamais de marques d'hostilité”, témoignent ses proches. Abondant dans le même sens, Jean-Marie Huet, procureur de Nantes rappelle le concert de louanges qui ont accompagné la nomination du préfet. Les oppositions à cette consécration, tues jusque-là, se seraient-elles exprimées avec une telle violence sous l'instigation de quelques groupuscules de l'extrême-droite? “Nous n'avons pas de pistes car il n'y a pas eu de menaces ?”, explique le procureur de Nantes avant de renchérir : “C'est tout de même un attentat élaboré puisque la voiture n'était pas devant chez lui et qu'il fallait donc savoir que c'était la sienne”. Diligentée avec une grande célérité, l'enquête judiciaire doit déterminer les causes de cet attentat et identifier ses hauteurs. D'emblée, le magistrat reconnaît qu'elle ne sera pas “facile” dans une ville “où aucune structure dure n'a été repérée à ce jour”. L'extrême-droite, des intégristes musulmans ou des jalousies d'ordre privé, les éventualités sont nombreuses, mais aucune n'est explorée pour le moment. Les enquêteurs s'attèleront d'abord à vérifier si la bombe était destinée à exploser sur le champ ou si elle était équipée d'un retardateur. Des analyses seront faites par ailleurs pour définir la nature de l'explosif. Réagissant hier, le ministre de la Justice, Dominique Perben, a promis de faire la lumière rapidement sur cette affaire. De son côté, le ministre de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, a, dans un entretien téléphonique, assuré le préfet que “tous les moyens d'enquête seront mis en place afin d'identifier les coupables et pour que cet acte criminel soit sanctionné comme il se doit”. Enfin, le président Chirac a demandé “la plus grande fermeté”. Il est à rappeler que la nomination de M. Dermouche au poste de préfet était à l'origine d'une profonde polémique entre Chirac et Sarkozy autour du principe de “la discrimination positive”. Le chef de l'Etat français ayant rejeté la proposition de son ministre de l'Intérieur, quant à la promotion à des postes de responsabilité, au sein des appareils de l'Etat, de compétences issues de l'immigration. Selon le locataire de l'Elysée, ces nominations doivent être fondées sur la juste reconnaissance du mérite quelles que soient les origines des personnes concernées. Aïssa Dermouche est un citoyen français d'origine algérienne. Il est installé en Hexagone depuis les années soixante-dix. Il a effectué l'essentiel de sa carrière dans l'enseignement privé. S. L.