Jamais de mémoire de Skikda, la ville n'a connu pareil désastre, et la zone industrielle qui devait lui procurer bonheur et prospérité avec la création de milliers d'emplois, lui a également offert le drame d'avant-hier où des dizaines de travailleurs, des “caristes”, comme on les appelle, ont été soit tués, soit blessés. Le complexe a été soufflé par une explosion suivie d'un gigantesque incendie où les secouristes assistaient impuissants à la mort des travailleurs piégés à l'intérieur de la salle des commandes ou bien dans les locaux administratifs. Jusqu'à hier, on recherchait encore les corps des éventuels disparus, soit ensevelis sous les décombres, soit projetés très loin du lieu du drame et dont on ne connaît pas le nombre avec précision. Toujours est-il que l'hôpital de Skikda a été littéralement assiégé de monde venu aux nouvelles. Le spectacle est particulièrement émouvant avec les pleurs ici et là des proches des victimes. Des listes ont été affichées sur les murs et mises à jour au fil du temps et des arrivées de cadavres. Au total, à l'hôpital de Skikda, on a dénombré 23 morts parmi lesquels 9 n'ont pas été encore identifiés. Dans l'après-midi, les parents des victimes ont retiré les corps pour les enterrer au cimetière de Zef-Zef ; on aurait dit que toute la ville s'était donné rendez-vous, ce jour-là, pour pleurer à chaudes larmes ses innocentes victimes. eIles sont toutes originaires de Skikda, et toutes les composantes de la société skikdie étaient représentées. Le wali en compagnie de Djaballah et de Chakib Khelil ont assisté à la cérémonie qui s'est déroulée durant la prière du asr. Le complexe GNL est le plus ancien, et c'est là où travaillent généralement les véritables enfants de la ville qui habitent le quartier napolitain, les allées du 20-Août 1955, la cité Boulkeroua ou d'autres quartiers. Le ministre de la Santé a avancé officiellement le chiffre de 27 morts, incluant les décès survenus dans les autres structures sanitaires du pays vers où ont été évacués les blessés. et c'est là que toute la population se souvient du jour où on l'a privée d'un hôpital des grands brûlés comme si, quelque part certains responsables avaient décrété que Skikda ne méritait pas ce genre d'infrastructure. Parallèlement, un citoyen rencontré près de l'oued Saf-Saf regardant l'ancien pont désaffecté qui l'enjambe : “Cet ouvrage aurait pu être réparé de longue date et aurait servi à évacuer plus rapidement les victimes du désastre”. En fin de compte, on relève la nette impression chez l'ensemble des citoyens que la plate-forme pétrochimique n'est rien d'autre qu'une succession de malédictions qui s'abattent régulièrement sur la ville. Désormais, avec ce choc qui vient de se produire, la population est encore traumatisée, et la peur d'autres incidents s'est installée durablement. Cette partie de la ville constituera la hantise des populations, surtout limitrophes. Z. R.