Encore deux acteurs de l'histoire de la guerre de Libération qui s'en vont dans l'anonymat. Le destin aura voulu que Nassima Hablal décède le même jour que Mustapha Ben Mohamed, son compagnon de lutte. Elle mettait beaucoup de passion à parler de Abane Ramdane et laissait transparaître, chaque fois qu'elle évoquait son nom, un sentiment de fierté. La fierté d'avoir été sa secrétaire, d'avoir été une proche, un peu sa mémoire. Nassima Hablal, décédée hier à l'âge de 85 ans, avait gardé une mémoire intacte pour raconter, par le menu détail, son parcours aux côtés des grands de la Révolution. Grands par leur simplicité et leur humilité comme elle aimait à le dire en se remémorant des souvenirs avec Abane Ramdane qui avait trouvé, dans sa demeure, un refuge sûr, Aïssat Idir, avec qui elle avait travaillé au sein de l'Union générale des travailleurs algériens (UGTA), Amara Rachid et beaucoup d'autres responsables comme le défunt M'hamed Yazid. Sa conscience politique, elle l'aiguisa suite aux massacres du 8 Mai 1945 qui ont été le facteur déclenchant d'un militantisme qui l'a menée, jeune, à suivre les discours de Messali Hadj, à côtoyer les militants du PPA et ceux du MTLD jusqu'au déclenchement de la Révolution. Elle fut la connaissance de Abane et devint sa secrétaire en 1955. Elle fut, à ce titre, chargée avec l'équipe technique, qui avait pour seule logistique une ronéo, à sortir le premier numéro d'El Moudjahid, volumineux, de 70 pages, tient-elle à rappeler dans un entretien avec un confrère de la presse nationale comme pour souligner “la prouesse" et surtout dire que le défi a été bel et bien relevé. Une confiance absolue s'était établie entre elle et Abane, ce qui lui valut de connaître tous ses refuges. Et le principal sera celui de Belcourt à côté du jardin d'Essai qui n'était autre que sa maison. Elle sera arrêtée une première fois en 1955 et transférée à la prison Serkadji avant de l'être une seconde fois en 1957 alors qu'elle était secrétaire du Comité de coordination et d'exécution (CCE). Elle connut d'abord la torture à la caserne des Bérets bleus à Hussein-Dey. Puis ce fut Serkadji, El-Harrach, la prison la Roquette en France. Atroces et abominables furent ses mots lorsqu'elle se rappelle ses instants de douleur, une douleur indicible qu'elle a traînée jusqu'à la fin de ses jours. En dépit du poids des années, Nassima Hablal avait gardé ses souvenirs bien enfouis dans sa mémoire. Ce corps frêle était habité par une âme de militante à l'engagement sans faille. Une militante qui s'est formée aux côtés de gens désintéressés comme son compagnon de lutte Mustapha Ben Mohamed, un militant de la cause nationale et un fervent défenseur des travailleurs qui disparaît le même jour que Nassima Hablal comme pour signer la fin d'un engagement dévoué, entamé depuis plus de soixante ans. R. N./APS Nom Adresse email