Evoquant les mesures qui pourraient aider à atténuer l'état de délabrement du secteur de la santé, un confrère annonçait hier que "des députés veulent interdire aux spécialistes d'exercer dans le privé". L'idée d'une loi prohibant le cumul public-privé pour les médecins spécialistes est peut-être à creuser. Elle mérite d'être considérée avec toute l'attention qu'appelle une question qui concerne un domaine aussi sensible que celui de la santé publique. En attendant, le plus surprenant n'est pas là ; il est dans la virtualité que des députés (au pluriel) se soient penchés, puis concertés, sur l'état du système de santé national jusqu'à produire une proposition de solution à son marasme. Et ce, en pleine intersession, en plein été et en plein Ramadhan ! C'est bon, pour eux ! Ils ont voté une loi ou deux, enfin ce qu'on leur a soumis, au cours de la dernière session. Ce n'est pas de leur faute : le Président était absent et le Conseil des ministres suspendu, il n'y a pas eu de textes à parapher. Rendez-vous à la session d'automne ! À part Sellal, visiblement chargé de mettre "du mouvement dans le statu quo" - conseil subliminal d'Aït Ahmed - personne, parmi le personnel du pouvoir, n'a envie de se surmener à la veille d'une échéance déterminante pour l'avenir de ce personnel. La seule question qui tourmente les prétendants à la mamelle qui nous tient lieu de classe politique est la suivante : Bouteflika est-il en état de garder le pouvoir pour un quatrième mandat ? Suivie de questions subséquentes : sinon partira-t-il en avril 2014 ou avant ? Choisira-t-il son remplaçant ou est-ce à la procédure du choix du "moins mauvais" d'expédier, une nouvelle fois, la question de la succession ? Remarquons que lorsque l'on parle de succession, entre amis, dans une polémique d'initiés, dans la solennité des confidences susurrées, dans des analyses raffinées d'experts et de journalistes, l'option du choix souverain du peuple n'est jamais évoquée. Il y a, au fond, comme un consensus autour de l'invraisemblance politique d'une telle hypothèse. Si les députés avaient vocation à s'inquiéter de l'état du pays, il les aurait définitivement empêchés de dormir : l'Ecole n'arrive plus à cacher le délitement qui s'en est emparé, pas même le jour du bac ; l'enseignement supérieur est à la traîne du monde de l'université et de la recherche ; la justice n'arrive pas à se libérer de l'autorité politique ; la voie et les espaces publics sont insécurisés et crasseux ; la corruption prospère dans une réelle impunité ; la route tue plus que la guerre... Si l'affaissement, perceptible à l'œil nu, de l'Algérie pouvait affecter nos députés, on l'aurait su : la dernière opportunité de montrer leur attachement, par ailleurs tant affiché, pour l'intérêt supérieur du pays, s'est récemment présentée : celle de voter la mise sur pied d'une commission d'enquête parlementaire sur la corruption. Ils ont préféré remettre le couvercle et appuyer dessus. Non, les seuls députés qui sont encore en piste, en ce Ramadhan estival, s'agitent autour des sièges du FLN et du RND. Car ce qui est en jeu, c'est l'Algérie et les partis des strapontins. Des strapontins qu'ils disputent jusque durant les intersessions ! Finalement, pour ceux qui, depuis l'Indépendance, impose leur emprise au pays, l'Algérie n'est pas une cause, mais un butin. M. H. [email protected] Nom Adresse email