Les Maliens ont voté dimanche sans incident et en nombre au premier tour d'une présidentielle pour tourner la page de 18 mois d'une crise politique et militaire qui a plongé leur pays dans le chaos. Les résultats provisoires et officiels doivent être publiés au plus tard vendredi, mais dès dimanche soir, de premiers résultats donnaient une nette avance à Ibrahim Boubacar Keïta (IBK). Ces résultats non officiels indiquent que le septuagénaire pourrait même créer la surprise et l'emporter dès le premier tour. Ses partisans attendent de pied ferme sa confirmation officielle devant le quartier général de son parti, le Rassemblement pour le Mali (RPM) et à son domicile de Bamako. Candidat malheureux aux présidentielles de 2002 et 2007, IBK est un cacique de la vie politique du Mali qui est cependant resté très discret au moment du coup d'état du 22 mars 2012, qui a renversé le président Amadou Toumani Touré et précipité la chute du nord du Mali aux mains de rebelles touareg et de groupes djihadistes. Il ne s'est manifesté que lorsque, pressée de se désengager et de passer le flambeau à l'Onu, la France a poussé jusqu'au bout pour cette élection au Mali, malgré les difficultés pour organiser un scrutin aux normes démocratiques dans un pays déstabilisé par la guerre. "Nous serons intraitables." En des termes assez peu diplomatiques, le président français François Hollande avait signifié dès avril au Mali que Paris voulait ces élections du 28 juillet. Il avait même chargé son ministre des AE, Laurent Fabius, de s'assurer que les autorités maliennes intérimaires organisent le scrutin à la date fixée. Pour Paris, les élections au Mali étaient une question prioritaire, une fois chassés les groupes islamistes armés qui occupaient le nord du territoire, et il fallait battre le fer tant qu'il était chaud, c'est-à-dire faire passer un candidat "ouvert" à l'après-opération Serval, telle que conçue par la France. D'ailleurs, IBK, qui ne pouvait que se plier à la feuille de route du président français, se rendra compte de l'étroitesse de sa marge de manœuvre. Il devra composer avec le millier de soldats français que Paris va laisser au Mali, bien qu'Hollande ait estimé sa mission accomplie, mais aussi avec l'Onu qui reprend la suite de l'intervention française avec une force de maintien de la paix devant atteindre à terme 12 600 hommes. IBK, qui a proclamé dans ses meetings que son objectif prioritaire est la réconciliation d'un Mali profondément divisé, est l'un des rares candidats à s'être rendu à Kidal, ville du Nord-Est et berceau des Touareg, où les relations de Bamako avec les Noirs d'autres communautés sont également extrêmement tendues, parfois violentes. Dans ces villes du Nord, de Kidal à Gao et Tombouctou, vaste région où les Touareg ont fait flotter leur drapeau avant d'être chassés par les groupes djihadistes liés à Al-Qaïda, le vote s'est tenu sous la surveillance de Casques bleus de la force de l'Onu, la Minusma, et de l'armée malienne, assistés par les 3200 soldats français restés au Mali. La participation au scrutin a été très faible dans le Nord, et des partisans de la rébellion touareg ont manifesté pour l'indépendance de l'Azawad, nom donné par les Touareg au nord du Mali. En outre, le vote n'a pas été convenablement préparé dans ces régions. De nombreux électeurs ont cherché en vain leur nom sur les listes électorales. Dans le Sud par contre, le vote avait de quoi satisfaire le président français qui a salué "le bon déroulement du scrutin présidentiel malien, marqué par une mobilisation importante et une absence d'incidents majeurs", dans un communiqué publié dans la nuit de dimanche à lundi. D. B. Nom Adresse email