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Fin de l'ultimatum pour évacuer les places occupées par les islamistes
Le général Al-Sissi franchira-t-il le pas ?
Publié dans Liberté le 12 - 08 - 2013

Après avoir espéré de voir les pro-Morsi abandonner le terrain par lassitude, le général Al-Sissi ne peut plus reculer l'échéance de la remise en ordre. Les manifestations et les rassemblements permanents des Frères musulmans entravent la mise en application de sa feuille de route.
Impasse totale en Egypte où, malgré les menaces de l'armée, les partisans du président islamiste destitué, Mohamed Morsi, ont fêté l'Aïd en manifestant. Le général Al-Sissi, qui a les a menacé de sang, franchira-t-il le pas ? La veille de l'Aïd, le pouvoir mis en place par l'armée qui a annoncé l'échec de la médiation internationale, a demandé aux manifestants de lever leur sit-in à Rabaa Al-Adawiya, la mosquée au cœur du Caire et place Ennahda, proche de l'université centrale. Les défenseurs de la légitimité des urnes, refusant d'obtempérer, ont célébré la fête de la fin du Ramadhan sur les places qu'ils occupent depuis le 3 juillet, transformées pour la circonstance en véritables kermesses pour les enfants.
Ce fut la même chose dans de nombreuses autres villes du pays. Les menaces d'une dispersion par la force ne les ont pas dissuadé, et les pro-Morsi se sont même institués en "l'Alliance nationale contre le coup d'état et pour la démocratie" pour donner plus de tonus à leur manifestation jusqu'au "rétablissement de la légitimité constitutionnelle", qui passe par le retour aux affaires de Morsi, issu des Frères musulmans. L'armée qui hésite à donner un coup de pied dans la fourmilière islamiste, ses deux précédentes interventions contre les manifestants s'étant soldées par des carnages qui ont fait de très nombreuses victimes, dit examiner la manœuvre qui limiterait les pertes lorsque sera entamée l'opération de dispersion des deux grands rassemblements islamistes du Caire. Contrairement à certains médias égyptiens appelant carrément à "écraser les rassemblements des Frères musulmans", le nouveau pouvoir égyptien, qui a obtenu des prises de positions complaisantes des Occidentaux qui se sont en général abstenus de parler de coup d'état, sait qu'un nouveau carnage aura un coût élevé. Par ailleurs, même au sein des "civils" installés par les militaires, les partisans de la ligne expéditive sont minoritaires. Les libéraux, à l'instar de Mohamed El-Baradei, craignent pour leur image. Idem pour les salafistes et les représentants de l'islam conventionnel propagé par al-Azhar, favorables à la destitution de Morsi mais hostiles à tout exercice de violence à l'encontre de la confrérie des Frères musulmans dont, à vrai dire, ils sont des clones sinon des avatars. Mais face à cette situation d'impasse, le général al-Sissi a-t-il d'autres recours que la manière forte ? D'autant que la détermination des pro-Morsi n'a pas faibli d'un iota après plus d'un mois de protestations-répressions et malgré la rudesse du mois de Ramadhan. Les Occidentaux, l'Union européenne, dont la ministre des AE s'était rendue deux fois au Caire, et le secrétaire d'état américain et son adjoint chargé des affaires arabes ont essayé, en vain, de convaincre les Frères musulmans d'accepter l'état de fait et de participer au processus politique. Les Frères musulmans ont servi à Ashton, Kerry et Burns les mêmes arguments qu'ils tiennent aux manifestants de la place Tahrir qui ont "rectifié" la révolution du Nil : "accepter de valider le coup d'état militaire, c'est accepter le retour du système policier de Hosni Moubarak". Pour l'armée, un retour, même formel du président Morsi comme le suggèrent encore certaines propositions, passerait pour une "défaite" mais surtout aurait des conséquences durables sur son propre statut dans le système égyptien. Le coup d'état du 3 juillet censé débloquer la crise a créé un nouveau blocage, beaucoup plus dangereux pour l'égypte. L'armée pourrait décider d'en finir, le Premier ministre par intérim, Hazem El-Beblawi ayant annoncé la couleur : "Nous approchons du moment que nous préférerions éviter." à Rabaa Al-Adawiya comme place Ennahda, la réponse est venue en forme de défi : "On ne bougera pas." Des barricades de briques et de sacs de sable ont été mises en place au niveau des accès aux deux places. Après les fêtes de l'Aïd, le sang ? Beaucoup d'égyptiens le craignent.
D. B
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