Alors que tout le monde s'attendait à une éventuelle sortie de crise politique dans laquelle est plongée la Tunisie depuis juillet, l'opposition a émis, hier, un niet catégorique aux propositions d'Ennahda. Ce blocage va envenimer davantage la situation au risque de vivre un débordement surtout qu'une grande mobilisation populaire est attendue aujourd'hui dans tout le pays. Une situation à suivre de plus près. Pour l'heure, l'hétéroclite coalition d'opposition tunisienne a rejeté catégoriquement les propositions de sortie de crise du parti islamiste au pouvoir Ennahda, qui avait parlé lors des négociations avec les différentes parties d'une possible démission de son gouvernement. "Toute négociation sans dissolution (immédiate) du gouvernement serait une perte de temps", a jugé Taïeb Baccouche, un des représentants de l'opposition, après avoir reçu du syndicat UGTT, médiateur dans la crise politique, les concessions d'Ennahda. Jilani Hammami, un autre représentant du Front de salut national (FSN), l'hétéroclite coalition d'opposition, a qualifié de "double langage" la proposition des islamistes dont on ne connaît pas les détails. Le mouvement Tamarrod a, lui aussi, vite réagi. Son porte-parole, Assim Ghabri a estimé que l'acceptation d'Ennahda de l'initiative de l'UGTT n'est qu'une "couleuvre et manœuvre politique pour absorber la colère de la rue". S'étonnant de cet accord tardif, il s'est interrogé sur le refus d'Ennahda d'accepter ce compromis dès l'assassinat de Mohamed Brahmi. "Ennahda est embarrassé du lancement de la campagne ‘‘Errhal'' (dégage) et essaye de gagner du temps à travers ce repli", a-t-il dit, rappelant le maintien du sit-in du départ, de ses revendications précisant qu'une grande mobilisation populaire est prévue pour aujourd'hui samedi. Pourtant, jeudi, Ennahda a laissé entrevoir une lueur d'espoir de sortie de crise lorsqu'il avait admis pour la première fois la possibilité d'une démission du gouvernement d'Ali Laârayedh à l'issue d'un "dialogue national" dégageant une solution consensuelle à la crise politique, tout en soulignant que le cabinet resterait en place dans l'intervalle. "Nous allons maintenir la pression pour obtenir la dissolution du gouvernement, nous avons un plan pour augmenter la mobilisation sur le terrain à partir de ce samedi", a dit M. Hammami. L'opposition prévoit toujours une "semaine du départ" à compter d'aujourd'hui pour tenter d'arracher, via des manifestations pacifiques, le départ du gouvernement en place et son remplacement par un cabinet apolitique de salut national. Le premier grand rassemblement est prévu aujourd'hui à partir de 18h00 sur le lieu quotidien de la contestation face à l'Assemblée nationale constituante au centre du Bardo, où depuis près d'un mois manifestants et députés d'opposition observent un sit-in. Les 6 et 13 août, des dizaines de milliers de personnes avaient battu le pavé à cet endroit. L'UGTT, forte de ses 500 000 membres et capable de paralyser le pays par des grèves, censée être une organisation syndicale, a pris le rôle de médiateur entre opposants et islamistes depuis le 6 août à la demande du président de la Constituante qui a gelé les travaux de l'Assemblée. Le secrétaire général du syndicat, Houcine Abassi, devait rencontrer en fin de journée d'hier le chef d'Ennahda, Rached Ghannouchi. Outre la question du gouvernement, le dialogue national réclamé par Ennahda doit permettre de régler d'autres désaccords, en particulier sur la rédaction de la Constitution, en cours depuis octobre 2011 et en panne depuis des mois, et sur le contenu de la future loi électorale. I. O. Nom Adresse email