Les bottes de foin, car il faut bien nourrir ces bêtes-là, envahissent les trottoirs, les carrefours, alors que les bêlements des moutons accompagnent les journées et les veillées nocturnes. À la veille de la célébration de l'Aïd El-Kébir, Oran est bien parée aux couleurs et odeurs de la campagne. Il faut être aveugle et peut-être même un peu enrhumé pour ne pas remarquer à quel point certains quartiers du centre-ville d'Oran ont été transformés en étable citadine. Alors que les autorités locales avaient, une fois de plus, annoncé que la vente des moutons serait bien régentée avec 70 sites de vente autorisés à l'échelle de la wilaya, en plus de l'ouverture du grand marché à bestiaux à El- Kerma, force est de constater que certains maquignons ne se départissent pas de leur pratiques. Et du coup, c'est un spectacle unique qui s'offre aux visiteurs en passant par certains quartiers comme St-Pierre, St-Eugène, Maraval, El-Hamri, les HLM et sur le grand boulevard du Millénium, où des dizaines d'ovins sont de la partie, trônant et vadrouillant le plus normalement du monde, regroupés dans des enclos situés sur des espaces verts, sur des terrains dénudés adossés à la rue Larbi-Ben-M'hidi. Les bottes de foin, car il faut bien nourrir ces bêtes-là, envahissent les trottoirs, les carrefours alors que les bêlements des moutons accompagnent les journées et les veillées nocturnes. Au matin, le bon bol d'air rappelle cette campagne si colorée et aux odeurs chatoyantes que ne peuvent oublier du coup les citadins. Et comme il y a une logique "commerciale" à tout cela, vous trouverez à proximité des enclos le vendeur de charbon, le vendeur de barbecue et l'aiguiseur de couteaux. Chaque année, le même constat et les mêmes scénarios se reproduisent avec la mobilisation de contrôleurs qui n'arrivent pas à contrôler. Ainsi, des indiscrétions révèlent que ce sont près d'une cinquantaine de points de vente illicites en milieu urbain qui ont été recensés. Autres interrogations, l'introduction des moutons dans la ville a nécessité des moyens de transport, et on se demande comment ils ont pu échapper aux contrôles et autres barrages. Mais plus que tout, nous dit un inspecteur,"Ce sont les citoyens eux-mêmes qui provoquent ce genre de situation, le maquignon s'installe en ville parce qu'il trouvera toujours un client, et avec nos moyens, nous ne pouvons faire face à tous". Complicité active, passive, au final, nous assistons à une ruralisation du monde urbain, soit un inversement des repères logiques. D. L Nom Adresse email