Le Front des forces socialistes (FFS) ne désespère pas de réhabiliter ses 400 militants — des moudjahidine pour la plupart qui ont perdu tous leurs droits — morts entre 1963 et 1965, lors de la rébellion de Hocine Aït Ahmed contre le pouvoir d'Ahmed Ben Bella. Et pour faire aboutir cette revendication portée depuis plusieurs années, le parti d'Ahmed Betatache semble avoir trouvé la parade en mettant sur la table une sorte de vente concomitante : un statut de chahid pour les victimes des massacres du 8 Mai 1945 pour déblayer le terrain à une réhabilitation des martyrs de 1963. Selon une dépêche APS, le groupe parlementaire du FFS a présenté au bureau de l'Assemblée populaire nationale (APN) deux projets d'amendement de deux lois. Et l'un d'eux concerne, justement, la loi relative au moudjahid et au chahid adoptée en 1991 et présentée par le député et ancien président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (Laddh), Mustapha Bouchachi. Celui-ci propose rien moins que l'amendement de l'article 16 de la loi 91-16 suggérant l'octroi de "la qualité de chahid également à toutes les personnes ayant été victimes des massacres du 8 Mai 1945". Me Bouchachi a assorti sa proposition d'un article bis additif à cette loi et qui stipule que "les ayants droit des chouhada du 8 Mai 1945 bénéficient de tous les droits accordés aux ayants droit des chouhada de la guerre de libération". Explicitant sa démarche, le député d'Alger du plus vieux parti d'opposition a souligné dans l'exposé des motifs qui accompagne le projet d'amendement de la loi sur le moudjahid et le chahid : "La lutte des Algériens et Algériennes pour l'Indépendance a débuté au lendemain de la colonisation française." "Ne pas reconnaître les militants du 8 Mai 1945 tombés au champ d'honneur est un déni de leurs sacrifices et de ceux qui les ont précédés", a-t-il ajouté. Il n'est pas du tout exclu que les responsables du FFS aient jugé tactiquement plus judicieux d'exiger d'abord un statut pour les 45 000 manifestants algériens massacrés par les militaires français le 8 Mai 45 — quel député de n'importe quel parti osera s'opposer à une telle proposition ? — avant de prêcher leur propre cause, c'est-à-dire demander la satisfaction de leur vieille revendication, à savoir la réhabilitation des militants du FFS tués lors du soulèvement de Hocine Aït Ahmed en 1963. Lors de la commémoration du 50e anniversaire de la naissance du parti, le 29 septembre dernier, le premier secrétaire Ahmed Betatache a fait part à ses militants du dépôt, le 25 du même mois, d'une proposition de loi à l'APN pour la réhabilitation des victimes des événements de 1963. "Il n'y a aucun accord et aucune garantie au sujet de cette proposition, nous allons la défendre au Parlement", avait-il précisé comme pour rejeter d'un revers de la main les accusations de deal avec le pouvoir sur ce dossier portées contre la direction du parti. Mieux, M. Betatache estimait qu'il ne saurait y avoir de véritable réconciliation nationale sans la reconnaissance par l'Etat et la réhabilitation morale et matérielle de ces victimes. A. C. Nom Adresse email