Le fantasme de tuer le père n'est pas la première préoccupation de Sarah Haidar et Hadjer Kouidri. Bien que les préoccupations des deux auteures soient différentes, elles partagent la même passion pour l'écriture, avec une vision plutôt pratique et fonctionnelle de l'écriture. Sarah Haidar, auteure de Virgules en trombe (éditions Apic), et Hadjer Kouidri, auteure de Nawress Bacha (éditions Anep), ont animé, avant-hier au Sila, une rencontre portant sur les nouvelles voies d'écriture. Considérées comme de "nouvelles voix" littéraires, elles tracent –comme le suggère l'intitulé de la rencontre – de nouvelles voies sur le chemin de l'écriture. Sarah Haidar a expliqué que sa démarche a été purement esthétique, souhaitant "recentrer (son roman ou presque-roman) presque exclusivement sur l'écriture", tout en racontant "la douleur de l'écriture", qui est, pour elle, un sentiment "noble". Pour elle, "le personnage principal de Virgules en trombe c'est l'écriture". Sarah Haidar situe son écriture comme quelque chose de "très différent de ce qui s'écrit actuellement". Constatant que ce qui s'écrit accorde de l'importance au contenu et au thème, elle a donc décidé de "rééquilibrer les choses". Considérée par le modérateur comme étant "classique", utilisant de traditionnels codes romanesques, Hadjer Kouidri a expliqué que la modernité de son écriture, ou du moins l'innovation se situe dans l'affirmation du "je". Se disant fascinée par l'histoire, Hadjer Kouidri, qui a entrepris de minutieuses recherches pour écrire son roman, prix Tayeb-Salah, qui situe l'intrigue à la période ottomane, a soutenu que la situation de la femme et les difficultés qui y sont liées sont fortement présentes dans son œuvre, à travers laquelle elle recherche "la beauté". En outre, la question (ou problématique, c'est selon) de la langue a été abordée par les deux auteures. Hadjer Kouidri qui écrit en langue arabe, et Sarah Haidar qui a quitté la langue arabe pour écrire dorénavant en français, se sont accordées à dire que la langue d'expression est aujourd'hui un choix, et une "liberté" que prend l'auteur, ce qui était loin d'être le cas, il y a quelques années à peine. Pas tendre avec l'institution des prix, les deux auteures, qui en ont reçu, ont affirmé que ce ne sont pas les prix qui conditionnent l'écriture. "Ce n'est pas le gage d'un bon écrivain. Le bon accueil critique ça m'intéresse, mais les prix ne m'ont jamais intéressée", a déclaré Sarah Haidar. Hadjer Kouidri renchérira en estimant que c'est une "vitrine médiatique". Les prix pourtant boostent les ventes, mais pour cela il faut un véritable marché du livre et de l'édition, parce que l'institution des prix, chaînon important dans l'édition. Après la rencontre d'avant-hier, on peut oser quelques interrogations, et même essayer d'y répondre, à la lumière de ce que les deux auteures ont déclaré durant la rencontre. Somme toute, qu'est-ce qu'une nouvelle voie d'écriture ? Comment ceci se traduit-il concrètement ? Les "nouvelles voix" copient-elles des modèles d'écriture préexistants ou inventent-elles de nouvelles formes ? Est-ce que la nouveauté est à prendre ou à chercher d'un point de vue purement esthétique ou alors faut-il également s'ouvrir dans la recherche sur les thématiques ? De toutes ces interrogations, et après lecture (non exhaustive certes mais représentative tout de même) de ce qui se fait aujourd'hui en matière de littérature en Algérie, et après avoir écouté Sarah Haidar et Hadjer Kouidri s'exprimer sur leurs écritures, on décèle une différence de ton, une nouvelle manière de dire les "mêmes" choses, un "je" qui s'affirme, qui trouble le confort du lecteur, et qui fait parfois voler en éclats les certitudes du lecteur. Sara Kharfi Nom Adresse email