Après Bensalah le terrible avertissant les opposants au quatrième mandat que leur "heure va bientôt sonner", c'est au tour de Sellal le libre parleur de mettre en garde "les partisans de la fitna et les aventuriers" qui menacent "la stabilité", c'est-à-dire ceux qui contestent l'éternité du régime. Le ton menaçant adopté à Tipasa par le Premier ministre à l'adresse de l'opposition citoyenne contraste avec celui, engageant, qu'il a pris à Boumerdès pour "tendre la main" aux terroristes. L'assurance — justifiée — d'une victoire de leur candidat donne aux hommes du pouvoir des envies de sévir contre ceux qui osent réfuter le fait accompli. Ils semblent promettre, dès maintenant, les représailles qui ne manqueront pas de s'abattre sur eux, une fois cette histoire d'"élection" expédiée. "Tous ceux qui usurpent la démocratie devront répondre de leurs actes", a averti Sellal ! Nous n'en sommes, d'ailleurs, déjà plus à la simple menace : les quelques citoyens qui osent se prononcer contre le quatrième mandat sont régulièrement brutalisés, invectivés, embarqués, séquestrés, fichés. Et, au directeur général de la Sûreté nationale, de considérer ce traitement comme légitime en ce que leur manifestation n'est pas autorisée. Mais qui usurpe la démocratie ? Le pouvoir qui, d'autorité, en prive les citoyens ? Ou le citoyen qui aspire à l'expression démocratique dont on le dépossède ? C'est dans ce contexte répressif que le général Hamel ne manque pas de nous expliquer que les manifestants bénéficient d'un régime de faveur du simple fait qu'ils ne sont pas trop malmenés — doux euphémisme, à en juger par le témoignage de l'ami Benfodil — et qu'ils sont conduits vers un médecin, à la fin du circuit. Le pouvoir considère que la démocratie est usurpée quand des citoyens en font usage pour revendiquer un changement de régime ! Il est vrai que le régime n'a besoin ni d'honorer les règles démocratiques ni de les usurper. Il est sûr de son affaire : "Bouteflika n'a pas besoin de faire campagne pour être élu." Mais qui a dit que, dans le système algérien, la campagne faisait les présidents ? Puisque ce n'est pas le vote qui les fait ! La preuve : sans même avoir installé un comité de campagne, Bouteflika a pu collecter quatre millions de signatures, soit 20% des électeurs dans un pays où à peine 15% des inscrits votent ! Non, le régime a juste besoin de l'administration pour organiser la fraude, de la police pour réprimer la revendication et du Conseil constitutionnel pour entériner le résultat qu'il aura commandé. Le Président "sortant" n'a jamais eu besoin de faire campagne. Et s'il a fait campagne jusqu'ici, ce ne fut certainement pas pour accroître ses chances d'être élu ; il n'avait aucune chance de ne pas être élu, et avec une majorité écrasante, conforme à son exigence. L'usurpation de la démocratie est le fait du système. Même si son discours nerveux le trahit : l'arbitraire par lequel il s'impose aux Algériens est à ce point avéré, que même les oripeaux républicains dont il a toujours tenté de se parer ne peuvent plus dissimuler sa nature despotique. Voyant que toute campagne politique de persuasion serait vaine, le pouvoir s'est engagé dans une campagne psychologique d'intimidation. M. H. [email protected] Nom Adresse email