Contrairement à ce qui a circulé ces derniers mois, le projet de révision de la Constitution soumis à un débat général n'introduit pas une nouvelle fonction dans la haute hiérarchie institutionnelle du pays : le poste du vice-président. Pour combler le vide induit par sa maladie, le chef de l'Etat a opté pour l'élargissement des prérogatives du Premier ministre tout en le gardant sous son contrôle et son autorité. Le Président nomme le Premier ministre et met fin à ses fonctions. Toutefois, tout un dispositif est mis en place pour suppléer à l'incapacité physique et aux absences prévisibles du chef de l'Etat. Le Premier ministre signe, à la faveur de l'amendement de l'article 85 de la Constitution par la commission d'experts, les décrets présidentiels, comme il peut les soumettre, au Conseil de l'Etat, pour avis préalable. Un article 81 bis est ajouté et rédigé comme suit : "Le Premier ministre peut recevoir du président de la République, dans les limites fixées par la Constitution, une délégation du pouvoir réglementaire." Le Premier ministre peut présider les réunions du gouvernement. Le réaménagement de l'organisation du pouvoir exécutif vise, mentionne-t-on, dans le préambule de ce document, à "garantir une meilleure fluidité dans les relations entre ses composantes et d'assurer, notamment, une plus grande efficacité de l'action du Premier ministre par un renforcement de ses prérogatives". À noter également que le Premier ministre n'est pas forcément issu de la majorité parlementaire, sauf si ce projet est amendé à l'Assemblée nationale, au sein de laquelle le FLN dispose d'un nombre de députés suffisant pour faire passer ses propositions sans recourir nécessairement aux alliances. Après avoir donc concentré toutes les prérogatives autour de lui lors de la révision de la Constitution de 2008, Bouteflika en concède quelques-unes au Premier ministre pour faire taire ou atténuer la contestation autour de son état de santé. Car en réalité, la révision projetée qui devait normalement adapter la loi fondamentale aux exigences constitutionnelles suscitées par l'évolution de la société, n'a fait que pallier le vide laissé par un Président que la maladie empêche d'assumer totalement ses charges à la tête du pays. Les amendements concernant le pouvoir réglementaire, signifie un partage entre le Président et le Premier ministre, sans toucher aux autres pouvoirs fondamentaux. Les changements proposés confèrent au Premier ministre le rôle d'un simple coordinateur, sans lui octroyer plus de pouvoir concret, puisque c'est le chef de l'Etat qui décide des domaines et des missions qu'il va lui déléguer. Au final, c'est au chef de l'Etat de trancher, en toute heure et circonstance. Abdelmalek Sellal est l'homme tout indiqué pour accomplir ce rôle. Il a excellé ces derniers mois, en dépit des bourdes langagières qu'il n'a cessé de cumuler, dans l'art de faire croire que Bouteflika est toujours aux commandes, qu'il est à l'écoute des citoyens et surtout qu'il continue de s'occuper des problèmes du pays, notamment ceux liés à la sécurité nationale et de la stratégie économique du pays. Se séparer d'un tel allié, qui a fait preuve d'une fidélité à toute épreuve, aurait été hasardeux. Mais la confiance qui semble régner entre les deux hommes n'est pas suffisante pour le nommer au poste de vice-président. Même considérablement affaibli par sa maladie, Bouteflika veut garder le pouvoir. Tout le pouvoir. Nissa Hammadi Nom Adresse email