Résumé : Nora aura la surprise de sa vie en découvrant que son prétendant avait l'âge de son père et était déjà plusieurs fois grand-père. Sa tante Louisa, qui était l'artisane de cette situation, lui assura qu'avant de quitter les lieux, cet homme allait fixer la date de leur mariage. Nora lui répond d'une voix irritée : - Mais je n'ai pas encore donné mon consentement. Louisa se rembrunit : - Quel consentement ? Ta mère nous a bien dit que tu étais d'accord pour épouser Achour... Elle m'avait remis certaines de tes photos, et il n'a rien trouvé à redire. - Je n'étais au courant de rien moi ! Louisa la pince fortement cette fois-ci en lui chuchotant à l'oreille : - N'essaye pas de te dérober. Ton père a donné son consentement, et cela nous suffit. A-t-on idée de remettre en cause le choix de ses parents alors qu'on est une femme divorcée, mal vue et rejetée par la société ? Remercie donc Dieu de nous avoir permis de te recaser aussi rapidement. Nora masse son bras sur lequel un hématome commençait à se former. Elle se lève et quitte la pièce sans aucun regard derrière elle. Affolée devant cette incartade, sa mère s'écrie : - Ma fille est très timide... Elle est très émotive aussi... Vous l'excuserez, mais reconnaissez que les filles d'aujourd'hui sont plus effrontées... Nora en est une exception... N'est-ce pas Si Achour ? Lissant sa moustache grise, le vieil homme sourit de toutes ses fausses dents : - J'aime les femmes timides... Nora est très belle, et sa façon de s'esquiver me plaît énormément... Je reconnais là un trait de son éducation. Vous possédez une perle rare, qui sera bientôt mienne. Je vous promets de prendre grand soin d'elle. Heu... si vous permettez, j'aimerais fixer la date du mariage... Disons pour le début du mois prochain. Soulagée par l'empressement affiché par cet homme, la mère de Nora s'agite sur sa chaise, et sans laisser le soin à son mari de répondre, elle lance d'une voix vive : - Nous sommes tout à fait d'accord pour célébrer ce mariage dans les prochains jours mon cher Achour... Nous sommes si heureux de vous recevoir dans la famille, et notre bonheur sera complet de vous avoir bientôt comme gendre. Louisa pousse un youyou, et Nora, dans sa chambre, se met à verser de chaudes larmes d'amertume. Achour revint une semaine plus tard, les bras chargés de cadeaux. Il demande à la voir et lui apprend qu'ils allaient se marier sans tambour ni fanfare, car ses enfants étaient tous contre ce mariage et lui reprochent d'avoir pris une femme de l'âge de la plus jeune de ses filles. - Ils sont jaloux surtout de savoir que je vais épouser une jeune et jolie femme... C'est une sorte de concurrence déloyale pour eux. Nora avait gardé le silence. Elle l'avait laissé parler, sourire, gesticuler, rire... Pour elle, le monde s'était arrêté le jour de son divorce, et voilà qu'elle devrait affronter l'enfer avec ce vieux bougre qui a déjà tout une vie derrière lui. Ses parents la jetaient dans la gueule du loup ! Elle repense à ses études et à sa carrière d'enseignante sur laquelle elle devrait tirer un trait. Le vieil homme lui parlait toujours, mais elle n'entendait plus rien de ce qu'il lui racontait. Ses parents s'étaient esquivés, les laissant seuls pour plus d'intimité. Sa mère lui avait d'ailleurs jeté un regard plein de reproches en remarquant son air renfrogné, et brandit discrètement son index vers elle. Le message était clair. Nora n'avait plus le choix ! - Alors, où veux-tu qu'on passe notre voyage de noces ma beauté... ? Elle revint sur terre. Achour s'adressait à elle avec un grand sourire. Comment elle ne répondait toujours pas, il poursuit : - Je vais te proposer un coin tranquille et romantique... Il toussote et lui prend la main. Elle tente de la retirer, mais il resserre davantage la sienne. - Nous pourrions passer quelques jours au bled... En Kabylie... Je possède une belle maison, avec tout le confort moderne... Nous serions seuls et loin des regards indiscrets. Notre lune de miel sera fabuleuse, je le sens. Je n'aimerais pas être dérangé durant ces jours merveilleux qui nous attendent. Nora retint difficilement ses larmes. Elle s'imaginait très mal dans les bras de cet homme rustre, illettré, sans aucun savoir-vivre et qui, de surcroît, la dépassait d'une quarantaine d'années ! Elle regarde sa cravate mal ajustée, sa chemise chiffonnée et son costume bon marché et froissé. Un véritable paysan endimanché. Comme il n'avait presque plus de cheveux, il avait tenté de camoufler son crâne dégarni par quelques mèches éparpillées en les plaquant avec de la brillantine. En somme une coiffure à la Hitler qui le faisait paraître encore plus vieux. - Tu ne dis rien Nora... ? (À suivre) Y. H. Nom Adresse email