Plongée dans le chaos en raison de l'incapacité des dirigeants qui se sont succédé à la tête du pays depuis la chute du régime du colonel Kadhafi en 2011, à rétablir l'ordre, la Libye fonde beaucoup d'espoir sur son nouveau Parlement pour ramener le calme. En dépit des doutes sur sa prise de fonction en raison de la situation sécuritaire catastrophique dans la capitale, le nouveau Parlement libyen issue des élections du 25 juin dernier s'est installé lundi et a élu son président, à Tobrouk, sur fond de profondes divergences politiques entre courants islamiste et nationaliste. En effet, les élus islamistes et leurs alliés de la ville de Misrata ont boycotté la cérémonie de Tobrouk, la qualifiant d'anticonstitutionnelle, car estimant que c'était au président du Congrès général national (le Parlement sortant, dominé par les islamistes), Nouri Abou Sahmein, de convoquer cette réunion. Ce dernier avait d'ailleurs invité les députés à Tripoli pour une "passation de pouvoir", mais cette cérémonie a été annulée, et le président du CGN s'est contenté de lire un communiqué en début de soirée pour dénoncer la réunion de Tobrouk, "contraire à la Constitution". La présence de représentants de la Ligue arabe, de la mission de l'ONU en Libye et de l'Organisation de la Conférence islamique (OCI) semble toutefois avoir légitimé la réunion inaugurale de Tobrouk, ont souligné des analystes. Après une cérémonie protocolaire retransmise, les députés ont prêté serment, avant d'élire tard dans la soirée un des députés, méconnu du grand public, comme président du Parlement. Aguila Salah Issa, un député de la ville d'Al-Qobba, l'a emporté au terme d'un deuxième tour devant Abou Bakr Biira, qui a présidé la réunion inaugurale du Parlement. Aguila Salah Issa, un juriste qui ne revendique aucune appartenance politique, a occupé plusieurs postes dans le système judiciaire en Libye, sous l'ancien régime de Mouammar Kadhafi. A noter que quelque 160 parlementaires, sur les 188 que compte le Parlement, ont fait le déplacement à Tobrouk, épargnée pour le moment par les violences. Ce chiffre confirme une victoire écrasante des nationalistes devant leurs rivaux islamistes aux élections. On ignorait jusqu'alors la couleur politique du nouveau Parlement : les candidats étaient tenus de se présenter individuellement. Par ailleurs, l'Union européenne a salué dans un communiqué "un pas extrêmement important pour remettre la transition démocratique en Libye sur les rails". De leur côté, les gouvernements français, italien, allemand, britannique et américain ont également dans un communiqué commun salué la réunion des députés, tout en condamnant les violences dans le pays. Lors d'une rencontre à la Maison-Blanche, Susan Rice, conseillère à la sécurité nationale du président Barack Obama, et le Premier ministre libyen Abdallah al-Theni ont souligné l'importance d'un cessez-le-feu immédiat dans la capitale. Ils ont appelé "tous les partenaires" de la Libye à "user de leur influence vis-à-vis des différentes factions libyennes pour mettre fin aux combats dès que possible", a souligné la Maison-Blanche dans un communiqué. Ceci étant, plusieurs analystes estiment que les islamistes tentent de compenser leur défaite aux législatives en gagnant en influence sur le plan militaire. En deux semaines, les violences à Tripoli et Benghazi ont fait plus de 220 morts et un millier de blessés, selon les autorités. Et les combats ont poussé plusieurs capitales étrangères à évacuer leurs ressortissants. Le gouvernement de transition a fait état de "centaines de familles déplacées à Tripoli" et mis en garde contre l'"aggravation de la situation humanitaire dans la capitale". M T./Agences Nom Adresse email