L'armée américaine et des forces de "nations partenaires" ont mené pour la première fois des raids contre des positions de l'organisation Daesh en Syrie, dans la nuit de lundi. Au moyen d'avions de chasse, de bombardiers et de missiles Tomahawk, a indiqué le porte-parole du Pentagone, le contre-amiral John Kirby, sans révéler l'identité des partenaires qui ont participé à cette première série de raids contre des bases logistiques et des bases de djihadistes dans la ville de Raqa et près des localités de Tabqa, Aïn Issa et Tall Abyad, à la frontière syro-irakienne. Jusqu'à ces frappes, seuls les Etats-Unis ont dit qu'ils étaient prêts à lancer des frappes aériennes en Syrie. "Nous ne frapperons pas seuls", a néanmoins déclaré, quelques heures avant les frappes, Samantha Power, l'ambassadrice américaine à l'ONU, sans plus de précisions. Or, le tour d'horizon des partenaires qui ont refusé d'élargir leurs frappes en Syrie est édifiant. La Turquie, dont l'attitude vis-à-vis des djihadistes reste ambiguë, se refuse catégoriquement à intervenir militairement, ni en Irak ni en Syrie, malgré la libération de sa quarantaine de ressortissants kidnappés par l'Etat islamique à Mossoul en juin. Les pays arabes du Golfe, la Jordanie et l'Egypte font partie de la coalition mais ont clairement signifié qu'ils ne prendraient pas part aux bombardements. La Grande-Bretagne, empêtrée dans la crise écossaise malgré l'issue favorable à ses intérêts économiques et géopolitiques du référendum de jeudi dernier, rejetant la scission de ce pays du Royaume-Uni, mûrit encore sa décision de lancer ses Tornado et F16. Le Canada et l'Australie ont donné leur feu vert, mais sont focalisés sur l'Irak. C'est aussi le cas de la France. "Il n'y aura pas de troupes au sol et nous n'interviendrons qu'en Irak", a déclaré François Hollande lors de sa conférence de presse, le 18 septembre. "Nous refusons de choisir entre Bachar et les djihadistes." L'argument est invoqué lundi à New York par Laurent Fabius, son ministre des AE, qui a encore exclu de bombarder l'EI en Syrie. Paris, fer de lance de la mobilisation internationale contre le régime syrien, ne veut surtout pas apparaître comme "son allié de circonstance", martèle-t-on à l'Elysée et au Quai d'Orsay. Reste maintenant à détecter parmi la trentaine de membres de la coalition internationale montée par le président Barack Obama pour mener à son tour sa propre guerre au Moyen-Orient après avoir quitté avec précipitation l'Irak, livrant le pays pour ainsi dire aux djihadistes. Le locataire de la Maison-Blanche qui a ainsi marqué le pas à son prédécesseur George W. Bush, dont il avait pourtant exécré l'aventurisme militaire et le messianisme idéologique en tant que gardien de la conscience mondiale (!), avait prévenu, le 10 septembre, dans un discours solennel, qu'il se réservait le droit de frapper l'Etat islamique, y compris dans son sanctuaire syrien. "La décision de lancer ces frappes a été prise plus tôt dans la journée de lundi par le commandant de la région militaire centre, Centom, chargé des opérations dans cette partie moyen-orientale, en vertu de l'autorisation qui lui a été donnée par le commandant en chef, le président Barack Obama", a souligne le Pentagone. L'EI fait l'objet de bombardements quotidiens par l'armée américaine en Irak depuis le 8 août. Le président Obama avait autorisé ces frappes pour, officiellement, venir en aide à l'armée irakienne et aux forces kurdes mises en déroute par l'EI en juin, dont les combattants étaient parvenus aux portes de Bagdad avec une facilité déconcertante. Grâce à ces frappes, les forces irakiennes et kurdes ont pu reprendre pied et reconquérir plusieurs sites stratégiques.