Récompensé lors de la 9e édition du Festival national du théâtre professionnel d'Alger, pour son rôle de fou/sage dans la pièce Leilat ghadhab al-aliha, et malgré ses 30 années de carrière, le comédien affirme, quand même, que "le meilleur reste à venir". Dans cet entretien, il revient sur ses débuts et partage, avec nous, sa passion pour l'art des planches. Liberté : Commençons par vos débuts : vous êtes allé vers le théâtre ou c'est "lui" qui est venu vers vous ? Samir Oudjit : Nous nous sommes rencontrés à mi-chemin ! Tout petit, à peine 4 ou 5 ans, feu mon père, connu à Batna sous le nom de Michou, notamment dans le milieu sportif et culturel, m'emmenait avec lui au théâtre et au cinéma. Il y avait une vie culturelle à l'époque. Mais même si j'aimais et j'admirais ce métier, je ne me suis jamais imaginé comédien, même si mon père jouait au théâtre. Je dois tenir cela de mon paternel... En tout cas, durant tous mon cursus scolaire, j'ai souvent participé à différentes activités artistiques, mais j'étais plutôt enclin au théâtre. Puis, j'ai eu une très mauvaise expérience au lycée, qui a fait que j'ai abandonné mes études. C'est lors de ces moments difficiles où j'ai failli plonger que j'ai rencontré deux personnes qui comptent beaucoup pour moi : Chawki Bouzid et Ali Djebara. On s'est rencontré dans une salle de cinéma ; ils savaient que je m'intéressais au théâtre, alors ils m'ont proposé de les rejoindre dans une troupe à la maison de la culture de Batna. Et c'était comme vous l'imaginiez ? Mieux encore ! J'ai joué dans la pièce Gafla tsir de Salim Souhali. Quelque temps plus tard, j'ai rejoint le Théâtre régional de Batna et adhéré à la troupe Atahadi (le défi), et pour la deuxième fois, j'ai joué dans une pièce de Salim Souhali, intitulée Mohamed Afehloul. J'ai énormément appris grâce au mouvement associatif et à ces membres qui venaient de différents horizons avec de multiples expériences. C'était une phase d'apprentissage et de découverte, et la maturité dans tout cela ? Oui, apprentissage, rodage, épanouissement... La maturité est venue lorsque le regretté Azzedine Medjoubi est arrivé à Batna en 1993, pour monter Âalem el-baouche. Je peux dire, et avec conviction, que le théâtre à Batna a connu son âge d'or lors du passage de ce grand homme, qui a, d'ailleurs, allumé en nous cette flamme qui nous anime jusqu'à aujourd'hui. Nous lui devons beaucoup. J'ai joué le rôle du journaliste dans cette pièce que je n'oublierai jamais. Nous avons toujours joué à guichets fermés au Théâtre régional de Batna. Il y avait un avant et un après-Medjoubi. A mon sens, cette pièce est l'une des meilleures du répertoire algérien. Les comédiens ont-ils profité de son long séjour à Batna ? Bien sûr. Si je parle de ma petite personne, je dirais que c'est grâce à lui que j'ai appris la direction d'acteurs, le travail sans simulation, ni fardage, le partage... Dans les années 1990, Medjoubi faisait le voyage d'Alger rien que pour assister à des pièces pour voir les comédiens qu'il avait lui-même dirigés, alors qu'à l'époque, on ne parlait que de faux barrages. Du jeu, vous êtes passés à la mise en scène... Oui, relativement. J'ai adapté Vol au-dessus d'un nid de coucou qui a été ma première mise en scène. Le spectacle a été primé à plusieurs occasions. J'ai également eu une autre bonne expérience en dirigeant des enfants. Revenons à la pièce qui vous a valu le prix d'interprétation masculine au FNTP, Laylat ghadhab al-aliha, mise en scène par Djamel Marir. Parlez-nous de votre rôle... J'ai campé le rôle d'un fou/sage, un redresseur de torts inconscient des dangers, et qui affronte un pouvoir qui n'aime pas les insoumis. Je me suis donné à fond dans ce rôle, et d'ailleurs je dis toujours que je joue avec le cœur ou je ne joue pas, car je sais que sans sincérité ça ne marche pas. Je ne cherche aucunement à écraser les autres comédiens mais à partager. C'est la consécration... enfin Oui. Elle a mis du temps, mais il faut savoir attendre et ça ne fait que commencer ! D'ailleurs, le prix du FNTP, je le dédie à mes parents. Sinon, je trouve que le Théâtre régional de Batna s'exporte bien, la principale raison est le fait qu'il soit ouvert aux différentes expériences. Les comédiens ont beaucoup appris et ils sont sollicités un peu partout, et tant mieux. C'est un acquis qu'il va falloir consolider. Entretien réalisé par : R. H.