La Kabylie a vécu encore, hier, une journée où régnait un climat de tension. Une tension qui a commencé le week-end dernier, à l'arrivée de nombreux renforts de policiers en civil et de CNS dans la région. Si des tirs à balles réelles par la police ont été confirmés par des citoyens de différentes localités — ceux-ci ont pu récupérer des échantillons de douilles— hier, deux blessés par balle ont été enregistrés à Azazga, alors que, la veille, un jeune de 16 ans avait été également blessé au pied par des policiers à Irdjen. L'atmosphère est également marquée d'arrestations. Dans nombre de localités, les délégués sont pourchassés par la police, suite à des dépôts de plaintes de candidats du FFS, nous révèle-t-on de toute part. À Tizi Ghenif, trois délégués ont été arrêtés hier et avant-hier, alors que les autres ont pu fuir. À Azzefoun, après un rassemblement populaire tenu au chef-lieu de la daïra, six délégués ont été arrêtés, alors qu'à Ath Zmenzer, la police a opéré trois arrestations avant-hier au moment où dans la même soirée une expédition punitive a été menée contre la population. De nombreux commerces ont été saccagés et des domiciles ont été violés. Les comités de villages ont eu à tenir des réunions, vu la gravité de la situation. Alors que le commissaire est resté injoignable, nous indiquent les délégués de la localité, celle-ci a vécu deux jours cauchemardesques après l'arrivée de renforts de la police. Une vingtaine de blessés a été recensée dans cette commune paisible auparavant. À Aïn El-Hammam, deux blessés ont été enregistrés alors qu'à Azazga, de violents affrontements ont émaillé la marche populaire à laquelle a appelé le mouvement citoyen. À Iferhounène, toutes les routes ont été bloquées et les émeutes se sont poursuivies durant toute la journée d'hier. À Aghribs, de violents affrontements ont eu lieu entre manifestants et forces de l'ordre, après l'occupation par la force du siège de l'APC, bousculant même le maire. Dans cette même localité, un véhicule a été incendié et un autre totalement désossé par des CNS en furie, une arrestation a été recensée. À Akerrou, la mosquée servant de bureau de vote au village Tigrounine, a été occupée de force par des renforts de CNS et de police. Un vrai chantage a été exercé sur le comité de village pour qu'il remette les clés de la mosquée, allant jusqu'à arrêter trois jeunes et ne les relâcher qu'après que les clés leur furent remises. Aujourd'hui, un rassemblement populaire est prévu à la place du village. Par ailleurs, une marche populaire se tiendra, à Bounouh, à partir de 10h. En parallèle à tous ces évènements, les désistements des candidats s'accélèrent. À Bouzeguène, Slimani Ali et Messaoudène Amara se sont retirés de la course électorale, alors qu'à Ath Aïssi quatre candidats se sont désistés. La liste FLN de Tizi Rached et celle du FFS à Ath Zmenzer se sont, toutes les deux, retirées en bloc alors que la tête de liste FLN à Irdjen, seul parti en lice, a fini par se désister. La ville était fermée hier alors que des escarmouches ont été enregistrées à Larbaâ Nath-Irathen. K. S. Retrait collectif des candidats FFS d'Ath-Zmenzer • Dans une déclaration transmise, hier, à la presse, les présidents de dix comités de villages de la commune d'Ath-Zmenzer ont déclaré avoir convaincu douze candidats, de la seule liste FFS engagée aux élections dans la commune, à se retirer de la course électorale du 10 octobre. Cette décision a été prise après une réunion tenue avec les douze candidats concernés (dont la liste a été jointe en annexe) “et ce pour éviter l'effusion de sang, surtout après les évènements survenus les 5 et 6 octobre au chef-lieu de la commune, suite à l'arrivée des renforts de CNS, évènements qui ont engendré déjà une dizaine de blessés”, pouvait-on lire dans la même déclaration signée et cachetée par les présidents des dix comités de villages concernés. B. T. RCD : CC de Tizi Gheniff Un enseignant de tamazight enlevé • Le conseil communal (CC) du RCD de Tizi Gheniff informe la population de la commune que M. Belhout Ali, enseignant de tamazight, délégué du mouvement citoyen et militant du RCD, a été enlevé par les services de sécurité alors qu'il se rendait à son domicile. Le CC du RCD condamne énergiquement ces pratiques staliniennes, exige sa libération dans l'immédiat et assure le mouvement citoyen de son soutien indéfectible à son combat noble et juste jusqu'à la satisfaction pleine et entière de la plate-forme de revendications. Aït Zikki Les urnes brisées par des jeunes • Les portraits de Benflis, des bulletins de vote, des enveloppes jonchent les rues du chef-lieu d'Iguer Mehdi, à Aït Zikki. Les jeunes ont constaté, hier au petit matin, que l'école primaire du village, centre de vote de la localité, est occupée depuis la nuit par des policiers. Près de 200 policiers étaient, en effet, stationnés depuis vendredi dernier à la Maison de jeunes et à la mairie pour protéger le scrutin de jeudi prochain. Hier, des manifestants, dont de nombreux adultes, se sont regroupés devant l'APC pour exiger des policiers de libérer leur école. Ces derniers (les CNS) leur ont rétorquaient qu'ils avaient reçu des ordres de leur hiérarchie afin d'occuper et de protéger l'opération de vote. Selon les informations qui nous ont été données par des témoins, des jeunes se sont introduits de force dans les bureaux et ont pris les urnes avant de les casser en morceaux. Des émeutes ont aussitôt éclaté et une véritable bataille est engagée entre les CNS et les jeunes. Ces derniers avaient déjà, dans la nuit, barricadé tous les accès menant aux villages environnants. Des informations font état de tirs de balles en caoutchouc et des grenades lacrymogènes. Vers 11h, des renforts ont été dépêchés à Aït Zikki, où les affrontements ont atteint le pic de la violence. À l'heure où nous mettons sous presse, les affrontements se poursuivent et deux policiers auraient été blessés au visage. Pour rappel, la course à l'APC d'Aït Zikki n'est entreprise que par une seule liste, celle du FLN dont cinq membres, et non des moindres, ont déjà effectué leur retrait de la course électorale. C. N. O. Redjaouna Les habitants s'opposent à un meeting du FFS • Le maire sortant de Tizi-Ouzou et n° 2 sur la liste du FFS aux élections locales, a failli être lynché hier. Alors qu'il s'apprêtait à animer un meeting à Redjaouna, dont il est lui-même originaire, les habitants de ce village se sont fermement opposés à sa manifestation. Les choses ont failli tourner au vinaigre n'était l'intervention des délégués de la CADC pour calmer les esprits.