Depuis le 6 décembre, date de l'ouverture des négociations contestées le même jour par des sit-in à travers toutes les localités devant les brigades de gendarmerie, la localité d'El-Kseur, connue par sa sensibilité, vit au rythme d'émeutes au quotidien paralysant la vie dans la cité. Tout a commencé jeudi à 15 heures lorsque le sit-in observé devant le casernement de la gendarmerie a dégénéré en émeutes qui se sont poursuivies jusqu'à minuit. Le lendemain, les mêmes affrontements se reproduisent au même endroit avec une même violence jusqu'au f'tour. Après la rupture du jeûne, les jeunes et moins jeunes ont improvisé une marche obligeant les commerçants à baisser rideau. Le président de l'APC de la localité, de passage, a été agressé par les insurgés qui ont également endommagé sérieusement son véhicule. Le nouveau siège de daïra a été réduit en cendres dans la même soirée ainsi que les sièges du tribunal et des impôts qui ont subi des dommages. L'arrivée des renforts vers 21 heures a failli envenimer la situation lorsque, selon les témoins oculaires, les CNS ont provoqué les jeunes qui sont restés heureusement sourds aux exactions en continuant à affronter la gendarmerie, jusqu'à 23 heures. Samedi, la tension était prévisible. Les jeunes, soutenus par les écoliers qui ont déserté leurs salles de classe, se sont de nouveau attaqués aux éléments de l'escadron de la gendarmerie d'El-Kseur. Les affrontements ont duré jusqu'à 13 heures avec de nouvelles destructions des édifices publics (tribunal). Vers 16 heures, les CNS ont procédé à des arrestations tous azimuts. Rebouh Mourad, alors qu'il était en train d'appeler au calme, a été arrêté ainsi que 12 autres manifestants. Après le f'tour et les tentatives vaines du comité local pour libérer les jeunes interpellés «arbitrairement», les manifestants ont quitté la gendarmerie pour aller affronter les CNS. Le bilan de la journée s'est soldé par 38 blessés de part et d'autre. Parmi les interpellés, le délégué du comité local et un autre jeune ont été placés sous mandat de dépôt. Ce qui n'a pas manqué d'enflammer davantage la situation. Le lendemain, les scènes d'affrontements ont repris de plus belle avec un dérapage après le f'tour, lorsque les jeunes manifestants s'en sont pris à la Cité de la police en réponse aux bombes lancées par les policiers dans les foyers et qui sont restés sourds aux appels de détresse des familles. Pour se défendre, les CNS ont usé d'abord de bombes lacrymogènes qui n'ont point dissuadé les jeunes. Des tirs à balles réelles sont alors entendus et ont engendré 4 blessés (trois aux jambes et un autre à l'épaule). Les émeutiers redoublent de férocité devant le quadrillage de la ville par les CNS en civil qui ont multiplié les arrestations dont un homme de 49 ans surpris devant son domicile. Cette arrestation a provoqué à son père un arrêt cardiaque. Le lundi a connu les mêmes scènes. Dans la soirée de mardi, après une journée relativement calme, le comité local, a animé un meeting à l'esplanade de la mairie. Ali Gherbi a dénoncé, en premier lieu, «les pseudo-négociateurs» qui «sont une provocation délibérée qui a révolté de nouveau la région». Revenant sur la situation de pourrissement qui menace davantage la ville d'El-Kseur, le principal animateur du comité, déclare que «les arrestations sont arbitraires» en exigeant «la libération des jeunes interpellés». La destruction des biens publics et l'attaque perpétrée au sein de la résidence policière de Berchiche sont, pour l'orateur, «une manipulation à grande échelle et une énième provocation des éléments répressifs pour justifier les actes féroces en faisant usage de balles réelles et en déclenchant une véritable chasse aux délégués et des arrestations arbitraires». L'intervenant, devant une assistance nombreuse, dira à propos du pouvoir: «Il n'a jamais voulu mener la situation vers l'apaisement en allant à contresens des aspirations citoyennes» avant de conclure par un appel à la vigilance. Par ailleurs, le rassemblement a observé hier par les délégués de l'intercommunale de Béjaïa devant le tribunal n'a pas eu l'effet escompté vu que le procureur a refusé de les recevoir. La réunion, qui s'est tenue après ce refus au TRB entre les délégués n'a pas encore débouché sur des décisions. Nous y reviendrons dans nos prochaines éditions.