Le Club algérien des risques majeurs vient d'être créé par des experts à Alger. Le Club algérien des risques majeurs (CARM) est né. Cette organisation, qui se veut non gouvernementale, a vu le jour hier à Alger. Elle sera composée de divers experts, de professeurs en médecine et autres spécialistes de renommée nationale et internationale. L'idée de la création d'une telle association a germé à la suite des différentes catastrophes qui ont secoué l'Algérie ces cinq dernières années. Séismes, inondations, explosion de gaz à Skikda, invasion acridienne… En somme, quatorze risques majeurs sont recensés en Algérie. Sept sont des risques naturels et sept autres sont de type technologique et industriel. Le Club a été créé au cours d'une assemblée constitutive et à l'issue d'une journée nationale qui a traité des risques majeurs sur initiative d'experts, de consultants et d'observateurs très au fait dans ce domaine. L'une des questions de l'heure, qui a suscité l'intérêt des présents, est l'invasion acridienne dont sont victimes plusieurs wilayas du pays notamment celles des Hauts-Plateaux. La participation du ministre de l'Agriculture à cette rencontre n'est pas fortuite. Il est venu exposer la gestion de cette attaque inattendue du criquet pèlerin par son département. Plus de 2,5 millions d'hectares sont ainsi envahis par cet insecte. La prévention : une carence avérée Plus de 347 000 hectares ont été, selon M. Barkat, traités jusque-là. Le plan d'urgence élaboré a mobilisé, estime-t-il, quelque 45 000 agents sur le terrain de lutte. L'enveloppe consacrée est d'un montant de 778 millions de dinars alors que 8 centres de contrôle ont été déjà mis en place. La deuxième étape à laquelle se prépare le ministère de l'Agriculture demeure la plus cruciale. Car, les opérateurs et autres agents seront, pour cette fois-ci, appelés à exterminer les larves de ce criquet. Ce qui, il faut le dire, n'est pas une mince affaire. Une réunion, qui regroupera les ministres des 9 pays concernés est, à ce propos, prévue pour le 27 du mois en cours à Alger. Les participants auront à définir une stratégie commune de lutte antiacridienne. M. Chelghoum Abdelkrim, professeur en numérique et génie parasismique, président du Club, a pour cela, soulevé la problématique de la prévention dans notre pays. Il a mis l'accent sur la nécessité de dégager une stratégie de gestion des risques majeurs. L'Etat doit, estime-t-il, à titre d'exemple, allouer une enveloppe de plus de 100 000 dollars/an pour la prévention des risques d'explosion du complexe gazier d'Arzew. Or, la réparation des dommages coûterait une dizaine de fois plus cher… Le vieux bâti, l'autre risque… majeur Sur un autre registre, le président du CARM propose aux pouvoirs publics de dégager une cagnotte pour le renforcement du vieux bâti édifié à l'époque coloniale à Alger, Constantine et Oran. Ces habitations menacent ruines et risquent de s'effondrer à la moindre secousse tellurique modérée. Conçu pour être une véritable force de propositions, le CARM annonce d'ores et déjà la couleur. Le professeur Chelghoum propose à l'Etat l'installation d'agences d'étude de vulnérabilité et de renforcement de ces habitations. Celles-ci seront non seulement sauvegardées et plus résistantes mais éviteront surtout la mort de centaines de milliers de personnes. Il tire la sonnette d'alarme quant à l'urgence de la mise en normes parasismiques des bâtiments édifiés avant le séisme et qui n'étaient pas livrés. “Si l'Etat arrive à réaliser d'ici à 2009 quelque 400 000 logements et assure le renforcement et le confortement de 2 millions autres dans les trois métropoles Alger, Oran et Constantine, nous serons là pour l'applaudir. Car construire pendant ce quinquennat 1 million de logements est quasiment impossible”, avoue le président du CARM. Il suggère, en outre, la mise en place d'un système de veille pour faire face au phénomène des inondations. Des équipes spécialisées, doivent, affirme-t-il, réfléchir à l'installation de systèmes d'écoulement des eaux dans les villes. Dans la nouvelle ville de Boumerdès, pour ne citer que cet exemple, constate-t-il, les avaloirs sont rares. À Alger, les évacuations d'eau sont souvent bouchées ou sous-dimensionnées. Le professeur déplore également le fait qu'aucun référentiel parasismique n'a été effectué pour les ouvrages de travaux publics (ponts), des ouvrages spéciaux (métro, trémie…). Club des risques majeurs : une passerelle et un miroir pour l'étranger En termes plus clairs, il y a une absence de textes normatifs parasismiques globaux ou partiels de calcul de ce type d'ouvrages. Pour revenir au Club, un bureau provisoire a été installé pour rédiger les statuts qui seront déposés au ministère de l'Intérieur. Le CARM est une organisation apolitique, “apolémique”, scientifique et à but non lucratif. “Notre souci est de créer une passerelle entre l'Algérie et la communauté scientifique internationale”, précisera M. Chelghoum. Le Club sera désormais le miroir de l'Algérie en matière de risques majeurs. Des fichiers d'experts nationaux et internationaux seront aussi établis pour que toute personne se présentant comme étant experte de renommée mondiale soit identifiée. Les membres de ce Club semblent être échaudés par l'expérience vécue au lendemain du séisme du 21 mai où de simples ingénieurs venus de l'étranger se sont présentés en tant qu'experts de haut niveau. “Nous apporterons des critiques constructives et émettrons notre avis sur tous les textes et projets de développement qui seront planifiés dans notre pays”, soulignera le professeur. Ces experts afficheront leur point de vue sur tous les textes normatifs liés au génie sismique, les risques technologiques… “L'administration n'est de ce fait plus seule. Mieux, le Club peut servir d'organe consultatif”, ajoutera-t-il. Quant au financement du Club, M. Chelghoum Abdelkrim a indiqué que tous les dons qui sont disponibles à l'étranger et destinés au pays en développement seront récoltés. B. K.