Alors qu'une loi sur l'audiovisuel est en préparation, la presse écrite sera quant à elle soumise à de nouvelles mesures restrictives. Le ministre de la Communication s'est engagé à donner toute latitude aux membres de la commission de révision de la loi sur l'information de travailler sans l'immixtion de son département. En effet, M. Haïchour avait déclaré aux animateurs de cette structure, le 31 juillet dernier, à l'occasion de son installation :“Il vous appartient de définir les composantes du champ de cette loi telles que l'accès à l'information, la protection du citoyen et sa dignité, la carte de presse, l'impression et la diffusion, la publicité, l'aide à la presse, l'éthique et la déontologie, et le sondage d'opinions.” Mais qu'en est-il en fait ? Le ministre a soumis à cette même commission le texte d'un avant-projet de loi organique relatif à l'information, bien ficelé. Que prévoit ce texte ? Dans son exposé des motifs, il est énoncé que cet avant-projet de loi intervient “puisque la loi n° 90-07 du 3 avril 1990 est devenue inopérante”, compte tenu de la suppression en 1993 du Conseil supérieur de l'information et qui “a déséquilibré totalement le texte initial de la loi dont la philosophie se trouve complètement ébranlée d'une part et l'absence de rôle dévolu à une entité ministérielle particulière pour la prise en charge de prérogatives de puissances publiques, d'autre part”. Aussi, il est dit que ce texte de loi se fonde aussi bien sur un soutien des pouvoirs publics à la presse que sur son “autorégulation à travers les lois du marché”. Concrètement parlant, le texte de loi de Boujemaâ Haïchour durcit les dispositions législatives en matière de droit de réponse. C'est ainsi que dans son article 45, cet avant-projet de loi prévoit dans le cas d'un quotidien la publication de la mise au point ou de la rectification dans un délai de deux jours “sans rajout, ni suppression, ni intercalation”. Le texte de loi de Haïchour institue pour la première fois des articles spécifiques aux campagnes électorales. C'est ainsi qu'il est explicité que durant les campagnes électorales, le délai de publication de ces droits de réponse se trouve réduit à vingt-quatre heures. Aussi, il est établi dans l'article 46 que “le délai de convocation sur le refus d'insertion (de la mise au point) sera réduit à vingt-quatre heures et la convocation pourra être délivrée par ordonnance rendue par le président du tribunal”. “Le tribunal, est-il ajouté, statuera par ordonnance sur pied de requête”. En cas de refus de publication d'une mise au point ou d'une rectification dans un délai de huit jours suivant la réception, le projet de Haïchour prévoit dans son article 48 que le demandeur est “fondé à saisir le tribunal statuant en matière de référé”. “Le tribunal, est-il précisé, peut ordonner, sous astreinte la diffusion de la réponse”. Au chapitre des sanctions, une amende de l'ordre de 100 000 à 500 000 DA est prévue en cas de refus de diffusion d'une mise au point. Abordant le chapitre lié au statut du journaliste, l'avant-projet de loi énonce l'institution d'”une commission nationale de la carte de journaliste professionnelle”, dont la mission sera de délivrer la carte professionnelle. Cette entité est constituée selon l'article 59 de la loi par “un magistrat désigné par le Conseil supérieur de la magistrature, un représentant élu des journalistes de la presse écrite, un représentant élu des journalistes de la presse audiovisuelle, un représentant élu des éditeurs, un représentant du ministère de la Communication, un représentant du ministère du Travail, un représentant du ministère de l'Intérieur, un universitaire désigné par le ministre de l'Enseignement supérieur”. Le droit du journaliste d'accéder aux sources de l'information est également mis en exergue par cet avant-projet de loi. Ce droit, qui reste à prouver sur le terrain, est contenu dans l'article 63 : “Il est permis aux journalistes de consulter les documents émanant de l'administration publique se rapportant à l'objet de leur mission (…). Tout refus d'accès aux sources d'information opposé à un journaliste doit être motivé et est susceptible de recours”. En matière de délits de presse, le projet de texte de Haïchour annonce que “l'action publique et l'action civile se prescrivent trois mois révolus à compter du jour où elles ont été commises”. Aussi et dans le cas où le journaliste est condamné pour délit de presse, l'article 78 énonce que ce dernier ne peut faire l'objet d'une détention provisoire. Par ailleurs, cet avant-projet de loi annonce une prochaine promulgation d'une loi sur l'audiovisuel, d'une loi sur la publicité et d'un texte sur les sondages d'opinions. N. M.