Ancien capitaine des Verts et ex-sélectionneur national, Ali Fergani se livre dans cet entretien à un examen sans complaisance du football algérien. Liberté : Quel commentaire faites-vous sur la dernière défaite de l'EN face au Gabon ? Ali Fergani : C'est une amère défaite, très difficile à digérer. On savait que c'était un match très important pour la double qualification à la Coupe du monde et à la coupe d'Afrique aussi, mais on ne s'attendait à aucun moment à une telle défaite qui nous a d'ailleurs beaucoup surpris. On prévoyait une victoire évidente des Verts, compte tenu de leurs honorables prestations lors des matches précédents, notamment celui face au Nigeria, et également le niveau de la formation gabonaise qui n'est pas, faut-il le dire, l'une des meilleures équipes du continent. La rencontre avait connu trois tournants. Le premier était le but raté par Cherad qui pouvait constituer le déclic pour l'EN dans cette partie. Le deuxième était l'expulsion du dernier cité qui a compliqué davantage la tâche des joueurs. Le troisième, je dirai l'ouverture du score des Gabonais qui a désorganisé les joueurs algériens. À ce moment-là, nos joueurs étaient déstabilisés et ont perdu tout leur repère sur le terrain. En tout cas, c'est un dur échec qui compromet de plus en plus la qualification algérienne pour le rendez-vous mondial en Allemagne et remet en doute également le passage pour la CAN 2006 en Egypte. Mais d'après vous, qu'est-ce qui n'a pas marché ce jour-là ? Je pense que les joueurs n'ont pas pu supporter cette pression qui pesait sur eux. L'équipe a très vite lâché le match. Les joueurs ont démontré un visage maigre qui donne l'impression d'avoir joué sans aucune âme et sans hargne à vaincre. Nous n'avions pas pu imposer une mainmise certaine dans le jeu. La maîtrise du ballon a été cédée à l'adversaire qu'on sentait plus présent dans les actions. En outre, l'équipe n'a pas su gérer son infériorité numérique suite à l'expulsion de Cherad. À dix contre onze, les joueurs algériens ont continué à évoluer de la même manière, laissant beaucoup d'espace dont les Gabonais ont profité pour marquer. Finalement, en dépit des changements effectués à chaque fois au niveau du staff comme celui des joueurs, le football national n'arrive toujours pas à retrouver son statut d'avant. Quelles seraient les raisons de cette crise ? Je vais vous répondre simplement. Un joueur de football ne se prépare pas dans un laps de temps. Il nous faut dix ans pour former un joueur compétitif de haut niveau, voire dix ans pour bâtir une bonne équipe nationale. Cela nous ramène à dire que le mal du football national n'est autre que le manque de formation au niveau, en premier lieu, des clubs et l'absence surtout d'infrastructures d'entraînement. L'outil principal à cette formation, c'est l'espace de préparation, proprement dit le terrain d'entraînement. Ainsi, quand on voit des grands clubs, comme le Mouloudia et la JSK, ne disposant pas d'un terrain où s'entraîner, cela explique, à mon sens, la décadence du football algérien. Vous m'avez dit “retrouver son statut d'avant” (le football, ndlr) ; avant, tous les clubs étaient dévoués pour la formation. Tous les clubs, sans exception aucune, étaient attentionnés plus pour la formation des jeunes. Il n'y a qu'une seule et unique issue, c'est de retourner à cette formule qui est la formation, et de donner plus de moyens infrastructurels à ce sport pour démarrer à nouveau sur des bases solides. Des bruits circulent, ces derniers temps, sur votre éventuel engagement à la barre technique de la sélection nationale à la place de Robert Waseige… Pas grand-chose, du moment que j'ai appris cela par le biais de la presse algérienne. Mais, je vous le dis clairement que, jusqu'à présent, je n'ai pas été contacté par la FAF et que personne ne m'a fait l'offre d'entraîner la sélection nationale. Peut-on savoir votre situation actuelle ? Je suis sans club et libre de tout engagement. Seriez-vous preneur si la FAF vous sollicite pour le poste d'entraîneur national ? Je pense que les choses ne se représentent pas ainsi. C'est très prématuré et surtout ça ne sert à rien d'avancer quoi que ce soit maintenant, du moment que je vous ai dit que personne ne m'a contacté pour ce poste-là. M. B.