Pur produit de l'école soviétique, le président belarusse use de toutes les pratiques, dont la modification de la Constitution, pour se maintenir au pouvoir. Agissant à la manière des dictateurs du tiers-monde, Alexandre Loukachenko ne recule devant rien pour prolonger son règne à la tête du Belarus, ex-Biélorussie. Bloqué par la Constitution, limitant les mandats présidentiels à deux seulement, il n'a pas hésité à recourir à un référendum dans le but de la modifier afin de pouvoir en briguer un troisième. Les élections législatives prévues le week-end passé représentaient la meilleure occasion de faire passer la pilule. Les protestations de l'opposition, précédant le scrutin, n'ont servi à rien, si l'on se réfère aux résultats rendus publics, qui donnaient une majorité de “oui” à la proposition d'amendement de la Constitution. En effet, les résultats quasi définitifs indiquent que 77% des 90% de votants ont accepté les amendements proposés. Voilà des chiffres qui rappellent, à s'y méprendre, ceux couronnant les élections dans la majeure partie du tiers-monde. Ainsi, Loukachenko, qui a déjà modifié la Constitution en 1996 pour proroger son règne de deux ans, pourra se présenter une nouvelle fois en 2006, date d'expiration de ce second mandat. Misant sur la fidélité des nostalgiques de l'ère soviétique craignant une plus grande dégradation de leurs conditions sociales à la suite de l'instauration de l'économie de marché, Loukachenko est assuré de réussir son coup sous l'œil bienveillant de Moscou. S'accrochant, bec et ongles, aux maigres avantages sociaux qu'il leur accorde, retraite et assurance, beaucoup de Belarusses ne veulent pas opter pour le changement de peur de tout perdre, comme ils l'ont affirmé dans les reportages réalisés par des télévisions occidentales. Ayant dépossédé le Parlement de la majeure partie de ses prérogatives, il est considéré aujourd'hui comme un président bénéficiant des pleins pouvoirs. L'opposition belarusse a contesté les résultats et parle de “farce électorale”. Plusieurs appels ont été lancés, notamment de la part du plus grand opposant à Loukachenko, Lebedko, pour l'organisation de manifestations de protestation à Minsk, la capitale du pays. Cette situation est loin de plaire à l'Union européenne, qui ne cesse de critiquer ce régime. Toutes les mesures visant à l'isoler sont restées sans suite. Il faut dire que tant qu'il a la bénédiction de Vladimir Poutine, Loukachenko sera protégé. Les Etats-Unis désapprouvent également ce qui se passe à Minsk, mais n'agissent pas suffisamment pour changer la situation. Washington s'est contenté pour l'instant de dénoncer les résultats du scrutin car ses intérêts avec Moscou sont prioritaires et la conjoncture mondiale actuelle ne leur permet pas de s'aliéner le patron du Kremlin. Les observateurs occidentaux présents sur les lieux ont tous qualifié les élections d'“irrégulières”. Faut-il s'attendre à des pressions sur le Belarus de la part de l'Occident ? Les observateurs seront fixés après la présidentielle américaine. K. A.