L'un des deux élus assassinés à Bordj El-Bahri est troisième vice-président de l'APC. Il était en charge de la gestion du patrimoine foncier de la commune. La commune de Bordj El-Bahri vient d'être éclaboussée par une sombre affaire d'assassinats. Hier, aux environs de midi, deux de ses habitants et non des moindres, Nacer Menasria (40 ans), troisième vice-président de l'APC, élu d'El-Islah, et Houari Mohamed (64 ans), ancien membre de l'exécutif communal affilié au FLN, ont fait l'objet d'un attentat, avec arme à feu, très intrigant au lieu dit Brise-Marine, à l'entrée de la ville. Le premier, atteint à la tête, est mort sur le coup, alors que le second a succombé à ses blessures sur la table d'opération à l'hôpital de Aïn Taya, peu avant l'appel à la prière du maghreb. Que s'est-il passé au juste ? Les circonstances et les mobiles du crime n'ayant pas encore été élucidés, personne n'est encore en mesure de donner une explication. L'absence de témoins directs brouille davantage les pistes. Cependant, deux thèses sont privilégiées par la police. Si l'une, classique, a trait à l'attentat terroriste, l'autre, beaucoup plus persistante, évoque une ténébreuse histoire de règlement de comptes à propos de transactions foncières frauduleuses. La qualité de l'élu d'El-Islah conforte davantage cette voie. Depuis son élection, Nacer Menasria chapeautait le service de l'urbanisme et du cadastre de la mairie. En tant que vice-président, il lui échoyait le rôle de la gestion du patrimoine foncier et l'attribution de lots de terrain aux citoyens désireux de s'approprier une parcelle à bâtir. La victime était-elle impliquée dans un vaste trafic, qui a peut-être nourri les rancœurs de quelques escroqués ou, refusait-elle justement de céder à la corruption ? Elle a payé du coup le prix de son intégrité. Souvent, la commune de Bordj-El-Bahri a défrayé la chronique avec de multiples scandales ayant pour motifs des doubles attributions de terrain, des expropriations jusqu'à donner lieu hier à un acte de vengeance. Toutes sortes d'hypothèses sont avancées par les services de la police. De leur côté, les habitants sont unanimes. Dans leur esprit, il est clair qu'il s'agit d'un règlement de comptes. Un riverain rencontré sur les lieux du crime soutient cette thèse. “Toute la commune est à vendre. Vous comprenez”, dit-il ironique. C'est en entendant les coups de feu qu'il s'est précipité hors de sa maison. Sur la chaussée enlisée, il aperçoit un véhicule vert de marque Accent. La voiture appartient à la mairie. À son bord se trouvent les deux victimes. L'ex-élu FLN est déjà décédé quand notre témoin se précipite vers lui pour le secourir, alors que son compagnon agonise. Son thorax et son abdomen sont criblés de balles (sept au total). Le véhicule porte également des impacts de balles. Un tel indice pousse à croire que les deux élus ont fait l'objet d'un guet-apens. En tout cas, les lieux du drame sont propices à ce genre de forfait. Comme c'est un nouveau lotissement, l'endroit est isolé, un véritable coupe-gorge. De part et d'autre de la voie étroite s'élèvent des maisons en construction. La route ressemble davantage à une piste boueuse. Ce qui a retardé l'arrivée des secours et de la police. Pour leur part, l'assassin ou les assassins n'ont eu aucun mal à s'éclipser une fois leur forfait accompli. La nature boisée des lieux et leur proximité de la plage ont sans doute facilité leur fuite. Pourtant, non loin de là, à quelques centaines de mètres seulement, se situe une brigade de gendarmerie. “Eh alors !” suggère notre témoin, très caustique. Selon lui, le trafic du foncier est si vaste et la corruption tellement ancrée dans les comportements des différents représentants de l'Etat qu'il est difficile de distinguer les bons des mauvais. Jusqu'à l'heure, la loi de l'omerta protégeait la mafia du foncier. L'attentat d'hier exige que la loi de la République soit appliquée. Attendons les résultats de l'enquête… S. L.