Depuis son accession en 1969 à la présidence de l'OLP, le “Vieux”, comme l'appellent familièrement les Palestiniens, a mis à plusieurs reprises en échec la toute-puissance du Mossad israélien ou de Tsahal, l'armée de l'Etat hébreu. En octobre 1969, Yasser Arafat, alors à Amman, reçoit un colis piégé désamorcé à temps. Il met en cause les services secrets israéliens. Deux ans plus tard, en octobre 1971, alors qu'il visite en voiture des bases palestiniennes sur le front du Golan, il tombe dans une embuscade. Le chauffeur du véhicule est tué. Le 13 avril 1973, à Beyrouth, des commandos israéliens, héliportés de nuit dans la capitale libanaise, tuent trois de ses collaborateurs sans trouver le chef de l'OLP. Il était “miraculeusement ailleurs”, expliqueront ses proches. Ce défi permanent à la mort implique des mesures de précaution exceptionnelles, avec des changements permanents de domicile — jamais deux nuits dans le même lit ou plus de quelques heures sous le même toit — et une incertitude absolue quant à ses déplacements. Il se sépare rarement d'un puissant pistolet Smith and Wesson pendu à sa ceinture. Abou Ammar, son nom de guerre, se retrouve à plusieurs reprises en première ligne du champ de bataille. En août 1982, il fuit l'encerclement de Beyrouth par l'armée israélienne, évacué par mer avec l'aide de la France. Un tireur embusqué israélien le tient dans son viseur, attendant par radio un ordre d'appuyer sur la gâchette qui ne viendra jamais. En novembre 1983, Paris vole une seconde fois au secours du leader palestinien, acculé le dos à la mer dans Tripoli (Liban nord) avec ses fidèles par l'armée syrienne et des dissidents palestiniens. Quatre mois plus tôt, dans la nuit du 23 au 24 juin 1983, son escorte est mitraillée sur la route Tripoli-Damas par un commando puissamment armé. Arafat a changé d'itinéraire au dernier moment, échappant une fois encore à la mort. Son exil tunisien ne suffit pas à éloigner les menaces. Le 1er octobre 1985, son quartier général, situé dans la banlieue sud de Tunis, est presque totalement détruit par un raid de l'aviation israélienne qui fera 17 morts. Yasser Arafat, en route vers son QG, a fait demi-tour en entendant le bruit des bombes et s'est réfugié en lieu sûr. Pour ses multiples déplacements en avion, il n'a jamais disposé d'un appareil personnel, faisant appel au tout dernier moment aux compagnies aériennes de pays amis. Il va jusqu'à imposer de fréquents changements de cap aux pilotes, souvent décontenancés, et même les responsables de l'OLP ignorent son itinéraire et sa destination finale. En juin 1999, son avion atterrit en catastrophe dans le désert libyen. Il survit grâce au sacrifice de ses gardes du corps, agglutinés autour de lui pour amortir le choc. Ce “trompe-la-mort” a connu plusieurs accidents de voiture, notamment en se rendant de Beyrouth à Damas, à l'époque où il était basé dans la région. En pleine crise du Golfe, son véhicule fait plusieurs tonneaux sur la route d'Amman à Bagdad, il s'en tire avec un bras en écharpe. Principales dates de la lutte du peuple palestinien - 2 novembre 1917 : le secrétaire britannique au Foreign Office, Arthur Balfour, promet solennellement aux dirigeants sionistes un “Foyer national juif” en Palestine ; - 29 novembre 1947 : les Nations unies décrètent la partition de la Palestine en deux Etats, un juif et un arabe, à l'expiration du mandat britannique le 15 mai 1948 (résolution 181). Le monde arabe rejette cette décision ; - 14 mai 1948 : proclamation de l'Etat d'Israël. Les armées arabes entrent en guerre contre le nouvel Etat. À la fin de la guerre le 13 janvier 1949, plus de 400 villages arabes ont été rasés et 700 000 réfugiés palestiniens s'installent en Cisjordanie, à Gaza ou dans les pays arabes ; - avril 1951: la Jordanie annexe la Cisjordanie. Le roi Abdallah est assassiné trois mois plus tard à Jérusalem-Est par un Palestinien. La bande de Gaza est sous administration militaire égyptienne ; - 28 mai 1964 : après la création au Caire de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), son instance suprême, le Conseil national palestinien (CNP) tient sa première réunion à Jérusalem-Est et adopte une charte prônant la lutte armée contre l'Etat juif ; - juin 1967 : guerre des Six jours, à l'issue de laquelle Israël occupe Jérusalem-Est, la Cisjordanie et la bande de Gaza ; - 21 mars 1968 : quelque 400 combattants de l'OLP, soutenus par l'armée jordanienne, résistent à une attaque israélienne contre leur base de Karameh en Jordanie. Les Palestiniens font de cette bataille le symbole de leur résistance ; - 4 février 1969 : Yasser Arafat est élu président du Comité exécutif de l'OLP ; - 16-22 sept 1970 : les tensions entre l'OLP et la Jordanie débouchent sur de sanglants affrontements en Jordanie. Ce “septembre noir” fait plus de 3 000 morts. L'OLP se replie au Liban ; - 22 nov 1974 : Yasser Arafat est reçu aux Nations unies à New York, où il apparaît avec un rameau d'olivier et un pistolet. L'OLP obtient un siège d'observateur à l'ONU ; - juin 1982 : les forces israéliennes envahissent le Liban jusqu'à Beyrouth et contraignent l'OLP à se replier à Tunis ; - 9 décembre 1987 : début de l'Intifadha, soulèvement palestinien contre l'occupation israélienne dans les territoires, qui va durer six ans ; - 15 novembre 1988 : le CNP proclame à Alger la création d'un Etat palestinien indépendant avec Jérusalem pour capitale et accepte la partition de la Palestine ; - 13 septembre 1993 : après plusieurs mois de négociations secrètes à Oslo, Israël et l'OLP se reconnaissent mutuellement et signent une Déclaration de Principes lançant l'autonomie palestinienne en vue d'un règlement permanent ; - 1er juillet 1994 : Arafat retourne en terre palestinienne et crée à Gaza l'Autorité palestinienne, gouvernement autonome qui applique sa juridiction sur les zones évacuées par Israël ; - 20 janvier 1996 : Arafat est élu président de l'Autorité palestinienne. Un conseil législatif de 88 membres est élu le même jour ; - 23 octobre 1998 : accords de Wye Plantation (Etats-Unis) qui prévoient un retrait israélien en trois phases de 13% de la Cisjordanie. Seule la première phase a été réalisée ; - 14 décembre : visite historique du président américain Bill Clinton à Gaza ; - 5 septembre : le Premier ministre israélien, Ehud Barak, et Yasser Arafat signent à Charm Al-Cheikh (Egypte) une version renégociée des accords de Wye Plantation ; - 28 septembre : début de la 2e Intifadha après la visite d'Ariel Sharon (chef du Likoud), sur l'esplanade des Mosquées à Jérusalem ; - 29 mars 2002 : opération “Rempart”, plus grande offensive israélienne en Cisjordanie depuis 1967. Destruction d'une grande partie du QG d'Arafat ; - 16 juin : lancement de la construction d'un “mur” le long de la ligne de démarcation séparant Israël de la Cisjordanie, afin d'empêcher, selon Israël, les infiltrations de kamikazes ; - 14 février 2003 : cédant aux pressions internationales, Yasser Arafat accepte la nomination d'un Premier ministre ; - 30 avril : lancement de la “feuille de route”, plan de paix international devant conduire d'ici à 2005 à la création d'un Etat palestinien ; - 11 septembre : Israël prend la décision de principe de se “débarrasser” d'Arafat ; - 1er décembre : lancement de l'Initiative de Genève, plan de paix informel élaboré par des personnalités israéliennes et palestiniennes ; - 18 décembre : le Premier ministre israélien, Ariel Sharon, dévoile son “plan de séparation” des Palestiniens, menaçant de mettre en œuvre des “mesures unilatérales” ; - 2 février 2004 : Sharon annonce son intention de démanteler les colonies de la bande de Gaza ; - 22 mars : assassinat par Israël du leader du Hamas, cheikh Ahmad Yassine. Son successeur, Abdelaziz Al-Rantissi, est assassiné le 17 avril. Gaza, censée mettre fin en 2005 à 37 ans de colonisation juive de ce territoire ; - 29 octobre : Yasser Arafat, dont l'état de santé s'est brusquement dégradé, quitte la Cisjordanie pour Paris afin de se faire soigner. Il s'agit de son premier déplacement à l'étranger depuis décembre 2001. R. I.