Le grand argentier du pays reconnaît qu'il faut un taux de croissance minimal de 8% pour augmenter le pouvoir d'achat du citoyen et augmenter l'offre d'emploi. Les amendements introduits par l'APN au projet du gouvernement de la loi de finances et du budget pour 2005 induit une moins-value de 30 milliards de dinars au trésor public. C'est ce qu'a déclaré, sur fond de regret, le ministre des finances M. Abdellatif Benachenhou, hier, au cours de la séance de présentation du texte devant les sénateurs. Du coup, la fiscalité ordinaire ne sera que de 555 milliards de dinars. Un montant qui ne couvre même pas la masse salariale publique (les salaires des fonctionnaires) évaluée à 618 milliards de dinars. Le grand argentier du pays, pour mieux mettre en exergue le caractère social du texte du gouvernement, souligne que “le projet de loi prévoit 20 mesures à la faveur des ménages et des entreprises contre quatre seulement au profit du Trésor public”. L'Algérie, soutient-il, est le seul pays au monde à consacrer 9,3% du produit intérieur brut aux transferts sociaux, et c'est beaucoup. Le ministre des Finances est revenu longuement sur les hypothèses de base concourant à l'élaboration du projet de loi de finances, à savoir un prix du baril de pétrole à 19 dollars et un taux de change de 76 dinars pour un dollar, un taux de croissance économique de 5,2% et un taux d'inflation entre 3 et 4 %. Sur le taux de croissance projeté, le ministre reconnaît qu'il est insuffisant pour améliorer le pouvoir d'achat du citoyen et augmenter l'offre d'emploi. Il faut un taux de croissance de 8%, suggère-t-il. “Pourquoi l'Algérie n'atteint-elle pas ce taux de croissance alors que les ressources financières et humaines le permettent ?” s'interroge M. Benachenhou. La réponse du ministre : les réformes économiques sont insuffisantes. Il faut les accélérer. Expliquant les motifs ayant poussé le gouvernement à adopter le prix de 19 dollars le baril de pétrole comme base d'élaboration du budget, M. Benachenhou précise que c'était une mesure “prudentielle” visant à éviter à l'Algérie les répercussions négatives d'éventuelles fluctuations des prix du brut sur les marchés internationaux. Plus pédagogique, le professeur Abdellatif Benachenhou, chiffres à l'appui, souligne le niveau élevé d'endettement de notre pays (2 400 milliards de dinars de dette publique). Deux tiers sont des dettes extérieures et un tiers est une dette intérieure. Le ministre des finances, comme pour mieux mettre en exergue la nécessité d'accélérer les réformes structurelles, affirme que 70% de cette dette a pour origine les assainissements répétitifs des entreprises et des banques. “Tant que la situation des entreprises et des banques reste inchangée, la dette s'accumulera”, avertit M. Benachenhou. Selon lui, au cours des cinq dernières années, chaque année le Trésor public débourse 270 milliards de dinars pour payer les services de la dette, un montant supérieur au budget de l'éducation et de l'enseignement supérieur. Le ministre des finances est préoccupé aussi par l'inflation, importée, soutient-il. C'est que le dollar depuis 2000 a perdu 35% de sa valeur face à l'euro. L'Algérie qui achète en euro et vend (les hydrocarbures) en dollar subit de plein fouet la fluctuation des taux de change. L'augmentation de la valeur de l'euro renchérit non seulement les produits importés, mais aussi rogne le pouvoir d'achat des réserves de change. “Nous sommes menacés”, lance M. Benachenhou. Le ministre des finances a, par ailleurs, souligné devant les sénateurs la nécessité pour l'Algérie de respecter les engagements internationaux en faisant référence, sans la citer, à la mesure de reconduction de l'interdiction d'importation de l'alcool. Interrogé par les journalistes, M. Benachenhou s'est contenté de dire que la mesure “ne facilite pas la chose”, en suggérant une décision politique. M. R.