Résumé : Moyennant un beau billet, la voyante consentira à recevoir Khadidja et Taos en priorité. Cette dernière la contemple un moment, et se dit qu'à l'instar des autres chouaffate, celle-là aussi arborait le tatouage des merabtine... Etait-ce un subterfuge pour attirer les gens ? En attendant, El-Hadja Fatima s'entretenait avec Khadidja. La voyante continuait : -Athmane aime les femmes élégantes et distrayantes... Tu devrais t'occuper un peu plus de ta personne et prendre soin de toi... Voyons ! Puisqu'il te donne de l'argent, pourquoi te négliges-tu autant ? Un saut chez la coiffeuse de temps à autre ne te fera pas de mal... Quelques beaux habits, un peu de maquillage... Il faut savoir te mettre en valeur... Sinon... Elle prend encore une lente inspiration avant de pousser un long soupir. -Sinon... Je ne te garantis rien... Je vois auprès de lui une femme encore jeune et très charmante et surtout gracieuse... Elle n'est pas trop loin de toi... Tu dois même la connaître... -Hein ? Athmane me trompe ? Je le savais... Ses retours tardifs n'auguraient rien de bon... Et pourtant tu m'avais assurée lors de ma dernière visite qu'il allait revenir vers moi avec tout le regret d'un amoureux... -Certes... Mais je te le répète : les hommes comme Athmane aiment les femmes de leur goût... N'oublie pas qu'il t'a épousée sur insistance de ses parents... Maintenant, il a envie de vivre autrement... Si tu fais l'effort de t'occuper un peu de ta personne et de clouer ta langue de vipère, peut-être qu'il se rappellera de toi... La jeune femme était sidérée... Elle garde le silence un moment avant de murmurer : -Ne me dis pas que mon mariage est fini. -Pas encore... Mais si tu persistes dans ta conduite ignoble, il ne fera pas long feu... Khadidja baisse la tête. Elle était au bord des larmes, mais El-Hadja reprend : -Cette femme qui l'attire s'éloignera de lui... Je vais te donner une amulette et quelques herbes à brûler afin d'activer ce processus. Seulement, tu es avertie Khadidja... Une fois n'est pas coutume, mais l'habitude prend vite le relais. Alors, c'est à toi de jouer ton rôle de femme aimante et attirante pour sauver ton mariage. El-Hadja se tourne enfin vers Taos : -Ah ma sœur... Ah mon amie... Je sens ton cœur saigner... Tu es préoccupée et malheureuse... Tu n'as pas encore récolté la récompense de tes efforts et de ta persévérance. Taos hoche la tête : -Tu as bien vu... Mais... Mais que pourrais-je faire pour y arriver ? -Patience... Patience ma bonne femme... Ce poids sur ton cœur finira bien par s'alléger, et les nuages qui embrouillent ton ciel par se dissiper... Fais le vide en toi... Confies-toi à El-Hadja Fatma... Je suis ici pour panser les maux de ce bas monde... Raconte donc tes malheurs. Je serai un mur muet, et tu reconnaîtras en moi celle qui aime tendre la main pour réconforter les cœurs. -Merci ma sœur... Comme toutes les mamans, je ne souhaite que le bonheur de ma progéniture... J'ai deux filles et un fils... Ma fille aînée est mariée et mère de famille, mon fils est fiancé, mais ma fille cadette demeure mon plus grand souci... La voyante hoche la tête : -Je vois... C'est la femme oubliée du destin... Ah ! La vie... Elle offre à certains plus qu'ils n'en demandent et à d'autres même pas une bouchée de pain. Taos acquiesce : -Ma fille possède toutes les qualités requises pour faire une bonne épouse et une bonne mère... Mais comme tu le dis, elle est l'oubliée du destin. La voyante lui tapote la main : -Je vais voir ce que je pourrais faire pour elle... Tout comme pour Khadidja elle prend une lente inspiration avant de commencer à parler : -Ah ! ma bonne dame... Ah ! mon amie... Je sens déjà les relents d'un mauvais sort... Alors qu'elle était encore petite, ta fille a été remarquée par un membre de ta famille... Une femme très proche de toi... -Une femme de la famille ? -Oui... Heu... Je ne pourrais t'en dire davantage à ce sujet... Je n'aimerais pas être à l'origine d'un conflit familial... Je suis là pour aider et non pas pour casser... -Heu... Oui... Oui... Je te comprends... Seulement, j'aimerais bien savoir de qui il s'agit. La voyante lève la main : -Laisse tomber tout ça... Nous allons plutôt penser à l'avenir... Rien n'est encore perdu pour ta fille puisque j'entends des youyous... Un bon fel... C'est le symbole d'une joie évidente pour les prochains jours... Un homme va venir demander sa main... Un bon parti... Elle ne pourra espérer mieux. Taos porte la main à son cœur, et le sentit cogner dans sa poitrine... Elle avait le souffle coupé et sa langue refusait de remuer dans sa bouche. Elle était à sa première consultation chez cette voyante, et déjà cette dernière lui annonçait le mariage proche de Wassila, sans pour cela avoir recours à aucun remède miracle. (À suivre) Y. H.