Pour le chef de l'Etat, ce projet de révision a pour but de consolider les assises de la démocratie pluraliste, dans le respect de nos constantes nationales, tout comme il s'agira de réguler la compétition et même la contestation politiques. Présidant, hier, l'ultime Conseil des ministres pour l'année 2014, le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, prend acte et confirme que les consultations par deux fois menées autour de la révision de la Constitution n'ont pas été à la hauteur de ce qu'il aurait souhaité. Il y a comme un air de dépit chez le chef de l'Etat, obligé qu'il est de prendre acte du défaut de consensus autour de la révision de la Constitution. Qu'elles aient été conduites par Abdelkader Bensalah ou Ahmed Ouyahia par la suite, les consultations autour de la mouture de la Constitution ont manqué de mobiliser grand monde. L'opposition politique, dans son segment majoritaire, a décliné les invitations qui lui ont été faites. Aussi, le président de la République préconise-t-il de laisser la porte encore ouverte pour un temps devant les retardataires qui auraient toujours envie d'émettre des propositions. "De larges consultations ont été menées dans ce but (révision de la Constitution) voilà deux années. Elles ont été approfondies récemment, avec pour seules limites les constantes du peuple et de la République", a-t-il rappelé, ajoutant que "bien évidemment, la porte demeure ouverte devant ceux qui ne se sont pas encore associés à cette consultation qui reflète l'esprit même de la démocratie et qui est menée dans le respect des différences", a-t-il assuré. Le président Bouteflika a réaffirmé que le projet de révision de la Constitution aura aussi pour but, notamment, la consolidation de l'indépendance de la justice et la protection des libertés, le raffermissement de la séparation des pouvoirs et du rôle du Parlement et le renforcement de la place de l'opposition. En un mot, "il s'agira de consolider les assises de notre jeune démocratie pluraliste, dans le respect de nos constantes nationales, tout comme il s'agira de réguler la compétition et même la contestation politiques, en préservant toujours la patrie de toute anarchie et de toute dérive". La rallonge pour les consultations ne devrait cependant pas être longue, puisque le président de la République a affirmé, devant le Conseil des ministres réuni, que la révision de la Constitution qui parachèvera l'édifice institutionnel interviendra au courant de l'année 2015. "Dans le même ordre d'idées, le président de la République a affirmé que la nouvelle année connaîtra le parachèvement du chantier institutionnel en cours", a rapporté l'APS, citant le communiqué du Conseil des ministres. Il y a lieu de noter que, quoiqu'inscrite pour l'année prochaine, la perspective de la révision constitutionnelle n'est pas assujettie à un calendrier précis. Mais étant donné que Bouteflika autorise de nouvelles consultations, l'on pourrait supposer, d'ores et déjà, que ladite révision n'interviendra pas au courant du premier trimestre 2015, comme annoncé, ici et là, auparavant, parfois y compris par des voix réputées pour être au fait des secrets d'alcôve. Le recueil, à nouveau, d'éventuelles propositions et l'accomplissement, ensuite, du mécanisme institutionnel prévalant dans le cadre d'une loi cadre comme la Constitution, prennent du temps. D'ailleurs, le président de la République s'est interdit de préciser la manière avec laquelle il entend réviser la Constitution et, partant, la nature des amendements qu'il compte y apporter. La voie référendaire, obligatoire si la révision intéresse les équilibres institutionnels, est plus lourde que la voie parlementaire autorisée, elle, lorsque la nature de la révision ne concerne pas lesdits équilibres. Faisant contre mauvaise fortune, bon cœur, le président de la République maintient néanmoins le cap de la réforme politique qu'il a engagée en 2011 déjà. "Cette œuvre a été entamée avec la réforme de la justice, pierre angulaire d'un Etat de droit et colonne vertébrale d'une société de liberté et de citoyenneté", a-t-il soutenu, précisant qu'"elle a été élargie afin de créer un environnement meilleur pour l'affermissement des libertés, la promotion de la femme, l'épanouissement du pluralisme politique, et pour le développement du mouvement associatif". Le président de la République a, par ailleurs, saisi l'opportunité de la réunion de ce Conseil des ministres pour rétorquer à une opposition inquiète quant à la confection d'une Constitution sur mesure pour le pouvoir en place : "Le projet de révision constitutionnelle ambitionne à consolider les libertés et la démocratie" et "n'est pas au service d'un pouvoir ou d'un régime", a-t-il fait remarquer, poursuivant que "le projet de révision constitutionnelle que je proposerai conformément à mes attributions constitutionnelles, n'est pas au service d'un pouvoir ou d'un régime comme cela est prétendu ici ou là. Bien au contraire, il ambitionne à consolider les libertés et la démocratie pour lesquelles se sont sacrifiés les glorieux martyrs de la Révolution de Novembre". Si le président Bouteflika a travaillé à rassurer sur son intention en matière de révision de la Constitution, c'est qu'il a ressenti la fragilité de son chantier handicapé par l'absence de consensus, du moins celui qu'il aurait voulu. S.A.I.