Si les fellahs délaissent chaque année un peu plus l'abricotier et son fruit, c'est au bénéfice d'un autre arbre, plus résistant, mieux adapté au relief et au climat de la région. Il s'agit de l'olivier. Au nord-est de la wilaya de Batna, l'abricotier et l'olivier se côtoient pour former des vergers à perte de vue, aussi bien pour la production de l'abricot que pour la cueillette de l'olive. Ces deux richesses permettent à un millier de familles de toute la région (Tinibaouine, Ouled Si Slimane, Tislente, Ras el-Ayoun) de pouvoir vivre du produit de cette même terre en dépit des entraves qu'ils côtoient tous les jours, à savoir la rareté de l'eau, l'électrification clairsemée, mais surtout la décennie noire, qui était la cause d'un départ forcé de bon nombre de villageois. Cependant, un phénomène et pas des moindres semble se répandre chaque année un peu plus. En effet, si les fellahs délaissent chaque année un peu plus l'abricotier et son fruit, c'est au bénéfice d'un autre arbre, plus résistant, mieux adapté au relief et au climat de la région : il s'agit de l'olivier. Mais la réalité du terrain semble être très loin des discours de salon et des chiffres officiels. Le nombre des oliviers et des oliveraies a décuplé en l'espace de quelques années à la grande satisfaction des producteurs, qui ne cessent de réclamer la mise en œuvre de plusieurs dispositifs d'aide promis par les autorités et qui sont restés jusque-là lettre morte. Il s'agit, entre autres, de la réalisation des retenues d'eau et de barrages, l'aide promise pour l'irrigation au goutte-à-goutte et l'autorisation des forages, car les fellahs de Ras el-Ayoun, située à la limite de la wilaya de Sétif, sont autorisés à réaliser des forages, ce qui n'est pas le cas pour les agriculteurs de Batna ! Mais toutes ces contraintes n'ont pas empêché la production de l'huile d'olive de faire renaître une dizaine de moulins et pressoirs à huile. Cette dynamique a été possible grâce à l'abnégation d'un bon nombre d'agriculteurs qui se sont regroupés en association (El-Amel), pour défendre leurs acquits, nous dit Belgacem Bougraâ, président de cette dernière à Sefiane, à une dizaine de kilomètres de N'gaous. C'est dans un autre contexte et un autre esprit que, dans la commune de Boumia (daïra d'El-Madher), un investisseur a pris à bras le corps, depuis une vingtaine d'années, toutes les tracasseries inhérentes au secteur, pour relancer, à un jet de pierre du tombeau d'Imedghssen, l'oléiculture (oliveraie, pressoir à huile, mise en bouteille et exportation..). En effet, après plusieurs années de travail laborieux, l'entreprise familiale fait des émules. C'est ainsi que les Moulins Fatima, c'est le nom commercial de cette entreprise, n'ont pas cessé de grandir depuis 2002 avec la plantation du premier olivier (variété Chemlal) et le premier pressoir à huile qui n'a eu lieu qu'en 2009. Plus de 8 500 oliviers sont irrigués exclusivement au goutte-à-goutte et sans pesticides. Les producteurs rencontrés sur les lieux ont fait le déplacement de Biskra, Kenchela, Constantine et bien d'autres villes où on n'aurait jamais soupçonné l'existence de l'olivier. Et pourtant... ! La rapidité du service est saluée par les fellahs, car le moulin fraîchement acquis a une capacité de plus de 200 quintaux/jour. Cette prouesse ne s'est pas faite sans difficultés ; au contraire, l'alimentation en énergie électrique ou bien en eau ont nécessité un grand effort et de lourds investissements. Mais, cette saison, on connaît une petite baisse en termes de quantité mais aussi en qualité vu que l'olive a été victime d'un champignon qui a touché toute l'oliveraie de la région, jusqu'à Sefiane, qui est à plus de 100 km. Le plus gros de la production sera destiné à la presse et non pas à la consommation (olives de table), nous disent les producteurs, qui, en dépit de cela, restent optimistes. On nous dit d'ailleurs qu'il y a une cinquantaine d'année, Tahmemet avait son propre pressoir à huile géré par un des plus anciens agriculteurs de la région, Tayeb Bouhmatou, dit zizi Tayeb. Aussi, ce retour aux sources et à l'arbre de la Numidie ne peut être qu'un hommage à un homme qui a consacré sa vie à la terre. Ceux qui veulent être servis vite et bien font le voyage jusqu'aux moulins Fatima, et ceux qui sont patients et préfèrent le travail traditionnel se dirigent vers les moulins de Sefiane, chez ammi Ali. Ce sont des gens de ce gabarit, des hommes de cœur, qui aiment la terre, qui doivent bénéficier de toutes les facilités et non pas les intermédiaires qui vivent de la sueur des autres. RH.