Le 2e colloque annuel du Club Energy de l'Association des anciens diplômés de l'Institut algérien du pétrole (AIED-IAP), qui s'est tenu samedi dernier à l'hôtel Hilton, a été l'occasion, pour le panel d'experts présents, de plaider pour un modèle de transition énergétique basé sur la diversification des sources d'énergie. Dans un contexte de baisse des prix du pétrole, les experts estiment que ce modèle de transition énergétique est plus que nécessaire pour rompre avec l'économie rentière. Il est établi, de l'avis de tous, que le développement économique et social de l'Algérie n'est plus viable en raison de sa dépendance vis-à-vis des ressources d'hydrocarbures conventionnels. Il est donc nécessaire de passer au plus tôt à un autre modèle. L'expert Abdelatif Rebah a estimé que "le passage à un nouveau modèle de consommation d'énergie doit passer par des choix stratégiques", et a préconisé l'étude de la structure réelle de la consommation d'énergie afin de pouvoir réguler cette ressource. Un exercice auquel il s'est livré en s'appuyant sur des études réalisées par des organismes spécialisés. Il en ressort le caractère énergivore de notre pays. On enregistre un déclin de la consommation énergétique industrielle et un emballement de la consommation domestique et celle des transports. Selon les chiffres livrés par l'expert, la consommation des ménages en produits pétroliers est passée de 39% (de l'ensemble des consommations) en 1980 à 43% en 2013, alors que la part de l'industrie est passée de 31% à 21% durant la même période, et celle des transports de 30% à 36%. L'industrie semble donc un petit consommateur d'énergie. Ce boom de la consommation évalué autour de 7% par année influera forcément sur les exportations si, d'ici 2022, il n'y a pas de nouvelles découvertes, comme l'explique Mohamed Baghdadli, qui note un déclin plus rapide des exportations que de la production d'hydrocarbures conventionnels. En chiffres, le déclin de la production, entre 2006 et 2013, est de -25% pour la production et de -29% pour l'exportation de pétrole. Pour le gaz, le déclin est de -14,5% pour la production et de -22,5% pour l'exportation. Selon l'expert, "l'âge industriel alimenté par les énergies fossiles tire à sa fin, et les technologies basées sur le pétrole sont en déclin", d'où l'exigence de la mise en place de solutions dont "le développement des énergies renouvelables, les économies d'énergie, mais surtout le changement du mode de vie actuel basé sur le pétrole". Pour Tewfik Hasni, les défis pour l'Algérie sont de rendre plus efficace sa politique énergétique et de réduire le gaspillage de ces sources. "Il n'est pas normal de continuer à brûler une source qui devient rare", a-t-il ajouté, en appelant à investir massivement dans les énergies propres. Selon lui, l'utilisation du gaz torché dans des hybrides solaire-gaz permettrait à l'Algérie de récupérer près de 54 milliards de m3/an dans les centrales électriques. Selon Hasni, la consommation de Sonelgaz et ses clients sera de 40 milliards de m3, dans un scénario de consommation rationalisée sans ENR. Avec les ENR, cette consommation serait de 30 milliards de m3. Le professeur Chems-Eddine Chitour rejoint Hasni en disant que les ENR sont compétitives et que l'avenir de l'Algérie sera dans les renouvelables. Chitour plaide pour un bouquet énergétique basé principalement sur les ressources renouvelables. Le professeur Chitour reste, comme il l'explique, contre les gaz de schiste "maintenant". "C'est pour les générations futures qu'il faut former maintenant", a-t-il indiqué. Ce n'est pas l'avis d'autres qui, tout en appelant au développement des ENR, n'écartent pas l'option des gaz de schiste, à l'image de Mustapha Mekidèche qui estime que d'ici 2025 le recours au gaz non conventionnel est inévitable, précisant que le gaz de schiste ne dégage pas de rente. Pour sa part, Abdelmadjid Attar indique que si, d'ici 2022, on ne fait pas de nouvelles découvertes et si on ne développe pas les ENR, on ne pourra pas continuer à exporter. Mékideche fait un constat préoccupant. "La transition se fait sous forte pression", souligne-t-il, ajoutant que qu'elle n'est pas socialement admise. En conclusion, il précise que "la voie est étroite et nécessite un consensus social et politique qui n'est pas encore construit". S. S.